mercredi 2 novembre 2016

Nuit non réparatrice

Mon dernier billet parlait de s'accrocher. Je ne pensais pas que ce titre pouvait m'emmener encore plus loin dans ce souhait quotidien.

Je récapitule.  

Hier, les douleurs ne me laissaient pas de répit, et j'ai pensé tout juste comme ça, que ma nuit pourrait être meilleure (drôle hein?). C'est d'ailleurs devenue une sorte de souhait à mots couverts entre personnes affectées par l'encéphalomyélite myalgique: on se souhaite un super dodo réparateur :)

Eh bien le souhait ne s'est certes pas réalisé hier, tout le contraire. 

Je suis au lit vers 19:30 environ pour la nuit, après avoir respecté mon rituel dodo: pas de télé, pas de conversation émotive, ralentissement des activités et je devrais partir en orbite non sans avoir avalé mes médocs.

Flanc gauche: ouch, j'ai mal....On change pour le flanc droit.
Pour peu de temps, car les douleurs se font sentir dans l'épaule puis les bras, les mains, les jambes, les mollets, les pieds....

On recommence la tournée: gauche, droite etc.

Règle d'or: surtout, ne pas regarder le cadran lumineux!
Mais hier, je n'ai pas pu tenir: le cadran indique 22:45.
Ça, c'est trop. 
Je me lève, de mauvais poil.

Les chattes sont fort heureuses de me retrouver, mais je ne suis pas d'humeur.
Je me fais chauffer une tasse de lait que je bois lentement. 
Je pense à cette journée passée sous le joug des douleurs incessantes, de l'épuisement.
Je suis pourtant au max de tous les médicaments que je peux prendre. 
Je ne peux rien faire de plus que de constater où j'en suis.
Moi qui croyait que l'océan de larmes se pointerait, mais non.


Je veux juste....dormir.

Dormir. 
Dormir. 
Dormir 
Dormir


Un mot qui sonne comme des promesses que mon corps ne semble plus savoir m'offrir.

Je suis finalement retournée au lit vers 23 heures environ, et j'ai fini par m'endormir non sans avoir fait encore le "rouleau" dans ce lit que j'adore/déteste.





Surprise du jour:  la météo est passé de 1 celcius (froid et très humide) à ....14.
J'ai encore mal, mais c'est moins fort qu'hier. 
J'avoue cependant me sentir plus faible à cause du manque de sommeil.

Avec cette douceur inespérée, j'ai réussis à prendre un mini bol d'air dans ma cour. 
Je me suis émerveillée de ces feuilles d'érable qui s'étalent tel un tapis doré, sous mes pieds.

Dans une autre vie, je me serais précipitée avec énergie pour attraper mon ballet à feuilles, racler le tout pour en faire un bon compost pour mon jardin. 

Mais c'était dans une autre vie.
Celle d'avant où je faisais tout ou presque.
N'importe quand, n'importe où, sans compter. 
Je vivais à crédit, en quelque sorte.
Ma vie d'aujourd'hui est une vie de comptable.
J'ai compris qu'il faut compter, pratiquement tout.

Je dois calculer l'énergie disponible à tout moment. 
Rien que ça :) 

J'apprends à vivre avec "l'argent liquide" qu'est mon énergie.

C'est ainsi lorsqu'on vit avec l'encéphalomyélite myalgique.

Reste que je regarde avec envie ces tonnes de feuilles que j'aurais tellement aimé ramasser....


Mwasi


lundi 31 octobre 2016

S'accrocher

Depuis mon dernier billet, les choses se sont peu améliorées. Au topo plus rude des douleurs de froid, du sommeil vraiment pas réparateur et l'épuisement rapide et facile, mon moral a aussi perdu des plumes. 

Il est bien plat ce moral.
Je sens ma vie lourde.
Petite à la fois.
J'ai l'impression d'avoir un tsunami de larmes qui coule un peu à la fois ou bien ça sort à gros bouillons de temps à autre. 

Dans ce "pas de moral" actuel, j'ai pensé vous parler des petites choses qui me font du bien.



Zoothérapie à domicile

Je vous présente les chattes de ma fille. Jusqu'à l'arrivée de ces dames, je pestais contre les animaux dans les maisons et tout ce que ça demande de soins, d'entretien etc. 

Bien mal m'en pris, car maintenant j'ai versé dans la position contraire. Non seulement je les aiment beaucoup, mais en plus j'ai découvert que de leur parler, de prendre soin d'elles et de caresser leur douce fourrure me fait du bien. 

Et elles ne demandent que ça, se faire caresser: pendant ce temps, leur chaleur et ronronnements me calme, me fait oublier -si cela se peut- mes douleurs et l'épuisement. Leur chaleur m'aide aussi, car mes mains gelées en profitent :)  Leur accueil du matin ou quand je rentre de l'extérieur est aussi un petit rayon de soleil dans ma vie.

Je connais plusieurs personnes malades comme moi, et qui ont des animaux de compagnie. Quand je discute avec eux, nous avons tous les mêmes constats: les animaux peuvent contribuer à notre santé psychologique.




Tricoter

Lorsque j'étais adolescente, ma grand-mère m'avait appris à tricoter une foule de choses: des vêtements pour bébés, des bas de laine, des mitaines etc. Avec le temps bien sûr, le tricot n'a plus fait partie de ma vie pendant de nombreuses années et j'ai pratiquement tout perdu de ce savoir. Je ne sais que  tricoter qu'à l'endroit pour le moment. 

Depuis quelques temps j'ai repris le goût de tricoter. Bien dommage que je ne sache plus que tricoter des foulards :(   Je ne désespère pas de me lancer le défi de tricoter autre chose. Je tricote des foulards de toutes sortes de grandeur et de couleurs. Je sais qu'internet regorge de tutoriels de tricot alors quand je serai prête, j'irai choisir quelque chose de simple à faire. 

Je tricote. Je me concentre sur chaque maille. Le mouvement lent et régulier des aiguilles ou crochet me calme, me fait du bien. Je réfléchis ou je vide mon esprit. Thérapeutique quand j'en ai le goût.



Se doucher...assise

Dans une billet datant de 2015, je vous parlais de ce petit banc de toilette que j'avais trouvé dans un bazar pour quelques dollars. Je ne savais pas combien j'aimerais ce banc, et surtout maintenant alors que je me sens souvent plus faible, plus épuisée.

J'ai découvert le plaisir tout simple de me laver en position assise. Je me lave lentement et je laisse l'eau tomber sur moi le temps dont j'ai besoin pour me sentir bien. C'est LE moment de la journée que je préfère entre tous: la douche assise réchauffe mes muscles endoloris, défait certaines tensions au niveau des trapèzes (surtout ceux-là). Aussi, je ne porte pas mon poids ce qui économise ma précieuse énergie limitée. C'est tout un bonheur que je m'offre à peu de frais en tout cas. Je sais que dans plusieurs pays du Sud, les gens se lavent assis. Quel bonheur de se laver en étant assise :)



Lire

La lecture reste la meilleure distraction et de plaisir à portée de main. Il est vrai que parfois rien ne me tente, mais je finis toujours par trouver quelque chose à lire. 

Parlant de cette couverture de livre, je vous le recommande chaudement. C'est l'histoire vraie d'une jeune new yorkaise qui doit s'occuper de ses parents vieillissants au travers de sa propre vie de famille, en bande dessinée. 

C'est un livre rempli de questions, de douces vérités et d'autres plus troublantes mais qui demeurent toujours authentiques et actuelles.

Sacré courage qu'elle a eu de raconter son histoire en images. Très bon. Je me demande juste pourquoi Gallimard place ce livre dans la collection Jeunesse, car le sujet est loin de s'adresser à des enfants. 




Je m'accroche à ces petites choses du quotidien. 
C'est ce qui m'aide à avancer. 
Juste vivre. 
Passer cette période.
S'accrocher.
Demain sera peut être un petit peu mieux qu'aujourd'hui. 


Alors je croise les doigts.
Et j'espère...


Mwasi


jeudi 27 octobre 2016

Mauvais calcul

Je sirote une tisane de gingembre. Je me lève de ma sieste sacrée. Le décompte de mon état n'est pas bien réjouissant aujourd'hui, et pour cause: j'ai royalement pété mes limites. Je me sens en mille miettes. 

Lundi, je devais me rendre dans un organisme communautaire de mon quartier pour m'inscrire sur la liste de distribution de denrées de Noël du quartier. En principe, j'aurais dû avoir une voiture prêtée, mais ce ne fut pas le cas. Alors je me suis dit que je pouvais me rendre à pied question de ménager le budget serré, mais qu'au retour, je prendrai l'autobus et ne pas trop m'épuiser. 

Je me rends jusqu'à l'organisme et tout se déroule bien.  Je repars et une fois sur la rue principale au lieu de prendre le dit autobus, je me dis que je pourrais acheter des brocolis pour me cuisiner un potage.

Et c'est là que le problème débute....

Dans mon plan initial de déplacement, ce léger détour à l'épicerie n'était pas prévu. J'improvisais. Pendant que j'attendais mon tour pour payer, je me suis rappelée brièvement l'autobus. Une fois dehors, j'ai glissé les courroies de mon sac sur l'épaule, et je suis mise à marcher tranquillement sur le chemin habituel vers la maison. Ce n'est que quelques minutes plus tard que je me suis rendue compte que j'avais oublié de prendre l'autobus! 

Vraiment oublié.
Je me suis arrêtée. 
Que faire? 
Je prends le bus ou pas?
La maison était proche, et je ne voulais pas utiliser ma précieuse carte d'autobus alors que j'étais si près. En principe du moins. 

J'ai finalement continué de marcher.
Allez, tu peux le faire...
Je ne sais pas comment je suis arrivée jusqu'à la maison. 
Mon corps me semblait fait de plomb, de ciment ou de je ne sais quel autre matériau lourd. 

Chaque pas demandait une énergie folle.
J'avais l'impression de reculer et non d'avancer. 
J'ai fini par arriver à la maison, quel soulagement..... arrrrrrg!


Moi et mon cerveau embrumé...me reconnaissez-vous?


J'ai toutes les raisons de monde de m'en vouloir, croyez-moi. 
Surtout avec cet épuisement que je sens dans mon corps.   
Mais j'ai décidé que ce n'était pas utile.

Très faible
Coeur qui bat comme un fou
Difficulté accrue pour m'endormir
Douleurs au top (et les médocs aussi)
Faible comme un petit pou 
Pas d'humeur
Envie de rien  
Me sens en mille miettes

Un bon gros malaise post-effort comme je n'en ai pas eu depuis longtemps.
J'ai trop marché, trop forcé.
J'ai pété mes limites lundi.
Et jeudi, je suis encore en mille miettes bien "scrap"
Ça fait un bon bout de temps que je n'ai pas vécu cela mais cette fois, c'est fort.

Où est mon cerveau? 
Comment se fait-il qu'à l'épicerie, j'ai pensé à l'autobus mais qu'une fois sortie, l'idée s'est carrément évaporée? 
Je sais que les personnes affectées par l'EM ont de sérieux problèmes de mémoire.
Je place cette histoire dans ce même rayon, mais je suis intriguée par le fait que je n'ai plus pensé à l'autobus alors que je sentais bien comment la fatigue me gagnait.

Je me suis aussi demandée si ce n'étaient pas mes circuits neuronaux -dont Rick Hanson parle souvent- qui font que nous accomplissons des actions de façon automatique, qui ont tout simplement pris le relais, sans que je n'en prenne vraiment conscience. 

Bien sûr, on peut travailler ces circuits et en créer de nouveaux.

Sans en faire tout un plat, reste que cet épisode m'a préoccupée, questionnée. 
Je veux trouver des astuces pour ne plus me retrouver dans ce genre de situation.
Faut-il que je m'écrive un message avant de partir, et que je le relise pendant mon trajet? 
Peut être est-il temps de penser à instaurer un chrono quand je sors sur mon cellulaire, car je risque d'oublier ce que j'avais prévu? 

Quoi d'autre.....? 


J'aimais improviser "avant" que l'EM ne fasse partie de ma vie, mais ce n'est plus vraiment quelque chose de possible: il y a un risque élevé de me retrouver à court d'énergie, sans compter les effets néfastes sur mon état les jours suivants. 

Ce fut un mauvais calcul de ma part, en y ajoutant toutes les autres considérations.
Je ne perds pas espoir de trouver des trucs pour ne plus me retrouver dans ces situations. 

Emballée dans mes vêtements de laine, je me prépare à suivre un peu de télé de fin de journée. 
Une petite gâterie qui me permet de ne pas trop penser à la lourdeur de mon corps.

Et à mon moral, en forme aplatie ces jours-ci.

À bientôt,

Mwasi


P.S. Faites lire cette histoire à une personne qui ne connait pas l'EM. Il n'y verra que du feu, et se demandera comment on peut se retrouver aussi "scrap" JUSTE après avoir un peu trop marché. C'est fou quand même...

mercredi 19 octobre 2016

Plaisir secret

Je m'amuse souvent à faire des listes, toutes sortes de listes. Ça doit être un ancien réflexe d'administration, car j'en ai tout plein.  Une que j'affectionne particulièrement, c'est la liste des petites choses qui me font plaisir :)  Je fais cela, car je me suis rendue compte que souvent, je manque d'inspiration ou bien j'en oublie carrément.





 Il y a de cela quelques semaines, je savoure un petit plaisir secret lorsque je suis seule à la maison.

Ais-je piqué votre curiosité?

Alors voilà....je chante. 
Eh oui, je chante.
En fait, je me suis fabriqué un cartable où j'ai cumulé les paroles de mes chansons favorites. 
Je choisis la chanson que j'aime, je la fais jouer et je chante. 

Une sorte de karaoké bizarre.
Je chante avec le chanteur ou la chanteuse. 
Et j'adore ça. 
Ça me fait du bien :) 
Comme mes chansons sont sélectionnées selon mes goûts, je choisis celles qui cadrent avec mon humeur du jour, et je chante une ou deux chansons. 

Aussi simple que ça. 
Ce n'est pas une révélation planétaire qui va révolutionner le monde.

Mais ça révolutionne le mien, mon petit monde à moi. 

Le temps que je chante, mes douleurs sont mises de côté quelques minutes.
Je sens quelque chose qui s'ouvre au niveau de mon thorax lorsque je chante.
Je ne sais pas ce qui s'y passe, mais je sais que c'est bon.

Vraiment.

Je n'ai pas fait de recherches sur le web sur les bénéfices entourant le fait de chanter, mais je suis convaincue qu'il y en tout un paquet qui démontrent que chanter est thérapeutique. 

Pour le moment, ce plaisir secret me fait vraiment du bien. 
Pourquoi s'en priver? 
Je chante le temps que je peux et je tiens compte de l'énergie disponible.
Après tout, pas besoin de m'égosiller, juste chanter. 

Si on est en manque d'inspiration, on peut y aller avec de petites chansons d'enfant qu'on se rappelle, ça donne certainement un bon effet, j'en suis certaine.

Alors voilà, vous connaissez mon petit plaisir secret du moment.....:) 


À bientôt,


Mwasi

lundi 17 octobre 2016

L'EM fait-il mourir avant le temps?



On pourrait croire que je fais dans les sujets peu réjouissants ces jours-ci. Sujets peu réjouissants mais réalistes, et certainement de ceux qui font que la vie est ainsi faite.  

Quand j'ai lu le titre du billet "étude de la mortalité des patients atteints d'EM/SFC" publié par la Communauté francophone des malades de l'EM, je n'étais pas surprise. Ce n'est pas la première fois que j'entends parler du fait que les personnes affectées par l'EM meurent plus tôt, ayant un corps qui s'est usé trop vite.

Pas étonnant. Je reprends directement ce qui a été publié: 

"Une nouvelle étude réalisée à l’université de DePaul aux États-Unis a analysé la mortalité des patients atteints d’EM/SFC en recrutant des familles, amis et tuteurs de patients décédés. Les données analysées incluaient la cause et l’âge du décès pour 56 individus. Les résultats suggèrent que les patients dans l’échantillon ont un risque de mort prématurée plus élevé par toutes causes (M = 55,9 ans), par maladie cardiovasculaire (M = 58,8 ans), et ils ont un age reporté plus bas de mort par suicide (M = 41,3 ans) et par cancer (M = 66,3 ans) comparé à la totalité de la population des États-Unis [ M = 73,5 (toutes causes), 77,7 (cardiovasculaire), 47,4 (suicide), et 71,1 (cancer)].

Ces résultats suggèrent qu’il y a une augmentation du risque de mort prématurée chez les patients. De par la petite taille de l’échantillon et la sur-représentation des patients sévèrement atteints, ces découvertes doivent être répliquées pour déterminer si les différences directionnelles pour la mortalité par suicide et par cancer sont significativement différentes de la population totale."  

Pour consulter l'étude en question (en anglais):  


Pour moi, cela fait sens. Les personnes affectées par l'EM vivent avec des niveaux de douleurs, de symptômes et d'épuisement variables selon le degré d'atteinte de la maladie, et tout cela pour de nombreuses années. C'est très rude. Notre corps est malmené par une foule de malaises tous plus invalidants les uns que les autres. 

 Il n'est donc pas étonnant que l'usure de notre corps soit en quelque sorte accélérée. 

Je n'ai que 55 ans mais je me surprends plutôt à me sentir plutôt comme si j'en avais 75. J'ai beau être grand-mère, je me sens plutôt comme une arrière-grand-mère en réalité. Je sens bien cette usure de mon corps, ce costume qui a subit tant de changements et de problèmes de santé.

Avec ma fille aînée, nous sommes de plus en plus à l'aise de parler de ma mort, sujet pas très facile. Dernièrement, j'ai demandé si elle pouvait veiller à ce qu'une autopsie soit pratiquée sur mon corps -même si je crois, c'est la norme- afin de déterminer les causes exactes du décès, et de déterminer si c'est l'EM ou non qui en sera l'origine. 

Je sais, ça fait un peu glauque. Mais j'y tiens mordicus, car je sais qu'au Québec, il y a un manque de statistiques pour ce qui est des décès causés par cette foutue maladie qu'est l'encéphalomyélite myalgique. 

Autrement dit, l'EM passe dans les craques du plancher du système de santé pour ce qui est des causes de décès. Voilà pourquoi j'aimerais qu'à ma mort ce petit détail ne se perde pas, et qu'elle serve à ces statistiques et que ce soit bel et bien enregistrée quelque part. Il nous faut des chiffres, des faits, des études pour les prochaines générations, et les malades de l'EM. 

Eh bien en attendant ma mort (rires), j'ai profité de cette belle journée pour rendre visite à ma fille et ses deux belles petites filles. Un avant-midi joyeux fait de bisous-câlins, de soleil, de collations et de petits doigts collés....que du bonheur.

La vie est trop belle dans ces moments remplis de tendresse :) 



À bientôt,

 
Mwasi


vendredi 14 octobre 2016

Vivre avec l'EM rime t-il avec vivre la pauvreté?





La pauvreté.

Un autre sujet délicat. Si on pouvait réaliser un court film résumant chacune des vies des personnes affectées par l'EM (PAEM), on pourrait constater que les parcours de vie de chacune est fort différent. Que certains vivent avec un revenu décent, mais pour d'autres, c'est tout le contraire. 

Certains ont eu le temps de faire carrière, d'autres n'ont même pas pu amorcer d'études, frappés trop tôt par la maladie.

Ainsi, plusieurs PAEM ont été des employés ou des employeurs avant que l'EM ne fasse son apparition, les éjectant de leur emploi. De ces malades désormais à la maison, certains réussiront à vivre de revenus plus bas, mais qui leur permettront de conserver un niveau de vie et des revenus décents pour vivre. 

Parmi ceux-ci, plusieurs devront parfois se battre soit avec leur milieu de travail et ou l'assureur afin de faire reconnaitre leur invalidité et leurs droits, soit en passant pas la négociation ou la voie juridique. Une fois ces droits rétablis, les PAEM ne vivent pas nécessairement dans l'opulence pour autant. Non. À noter que la lutte bouffe une énergie titanesque, et que plusieurs ne prendront pas cette voie pour des raisons de santé.

L'autre avenue possible est celle d'avoir accès à l'aide de dernier recours au Québec, aussi appelé aide sociale. Le montant mensuel de l'aide sociale varie en fonction de la catégorie dans laquelle une personne a été placée. Pour les PAEM, il y a la possibilité d'être reconnue comme étant une personne ayant des contraintes sévères à l'emploi (invalidité) : dans la chaine alimentaire de l'aide sociale, c'est le top. La personne reçoit environ 947$ par mois, mais il faut que la PAEM soit reconnue au niveau médical comme ayant ces contraintes. Sinon le montant d'aide sociale est d'environ 670$.

Si le montant de 947$ par mois est considéré être le montant le plus élevé, reste que la vie est rude par ici. Se loger avec un montant aussi peu élevé relève d'un défi innommable.

Il ne faut pas se gêner pour le dire: plusieurs PAEM vivent la pauvreté au Québec. Il n'y a pas encore d'études faites sur ce sujet, mais je souhaite fortement qu'un étudiant s'y intéresse pour que nous ayons un tableau plus complet de la situation. Il n'y a pas à aller très loin pour comprendre: quand j'observe les participants au groupe d'entraide, je vois bien que les PAEM vivent dans des contextes sociaux différents.


Vivre la pauvreté


Vivre la pauvreté c'est....

-tenter de trouver une banque alimentaire pour y prendre ce qu'on veut bien nous donner à manger. À ce chapitre, la plupart des banques alimentaires ne font pratiquement plus dans la gratuité mis à part quelques rares exceptions. Sinon, la plupart demande quelques dollars, prélevés dans un budget serré :( 

-chercher des solutions économiques pour se vêtir: on fréquente les bazars, les comptoirs de saint-Vincent-de-Paul, l'Armée du salut etc. Comment se payer un manteau d'hiver ou mêmes des bottes chaudes à 60$ sur un tel budget? Impossible à moins de couper sur les factures.

-chercher comment se loger à pas cher. Il faut alors lorgner vers une cohabitation avec d'autres personnes, chercher comment obtenir un habitation à loyer modique ou alors une place dans une coopérative. Dans ces cas, de très looooongues listes d'attente existent: le gouvernement n'investit pratiquement plus dans le développement de logements sociaux malgré des besoins criants en la matière pour toute une couche de la population. Gros défi...

-faire du troc avec des amis: on échange du matériel et hop! tout le monde est content....chaudrons, livres, vêtements dont on ne veut plus, meubles etc.

Et ce ne sont que les gros titres. Pour les personnes affectées par l'encéphalomyélite myalgique, les difficultés liés à la santé se mêlent à tout ce portrait de la pauvreté. Le fardeau de la maladie et son cortège de symptômes très difficiles à vivre nous empêche souvent de sortir, de chercher de l'aide. Pour faire tout cela, il faut de l'énergie. Forcément, les PAEM doivent puiser dans un bassin d'énergies déjà très basses. Comment faire? 

Pour illustrer le tout, allons-y d'une petite anecdote. 

Par un matin froid de novembre 2015, je me suis rendue dans une église désaffectée. Il fallait faire la file pour pouvoir s'inscrire pour obtenir un panier de denrées à Noël. Me tenir debout dans une file plus de 5-10 minutes me cause problème: l'intolérance orthostatique se met de la partie et mon coeur bat comme un fou. Impératif: m'asseoir. J'avais emporté mon petit banc de camping que j'ai déplié, et je me suis assise dessus dans la file. Sur le trottoir. Vous n'imaginez pas les gens qui se sont tordu le cou pour voir ce que je faisais :) 

Pas grave. Le ridicule ne tue pas, et je n'en suis plus à me soucier de ce genre de détail. C'est ainsi que j'ai pu attendre mon tour. Cependant, cette attente m'avait coûtée très chère, j'en ai encore le souvenir. Épuisée. Morte. Je sais fort bien que j'ai "forcé" la note, forcé mon corps à faire tout cela. Je pouvais encore me payer le luxe de forcer, imaginez. Mais plusieurs PAEM ne peuvent pas même faire cela: attendre avec un banc pliant dans une file, c'est trop, beaucoup trop pour eux. Sortir, faire des courses même minimes est insurmontable.

Je pense à une femme à qui j'ai parlé récemment. Elle m'a confié qu'elle ne peut pas se payer internet, et qu'elle se sentait isolée, en retrait. Dieu merci, elle a au moins le téléphone pour qu'on arrive à la joindre. Mais combien de PAEM ne peuvent pas même se payer un téléphone? Je suis certaine qu'il y en a beaucoup qui vivent cette situation présentement.

Les problèmes de santé que les PAEM éprouvent touchent toute une gamme de déterminants de la santé. Du fait que nous soyons en mauvaise condition physique, il nous est difficile d'effectuer un foule de démarches ou même difficile de chercher à améliorer ses conditions de vie. Ce qui demande une énergie physique et psychologique folle.

Aussi, plusieurs médecins de PAEM ne s'intéressent que très peu au statut de leur patient, ce qui a des conséquences. Je pense à une PAEM qui s'est fait dire par son médecin de débuter une diète sans gluten, sans lactose etc. Suivre ces recommandations demande passablement d'argent pour acheter des produits onéreux, pas du tout à portée de bourses des personnes qui vivent de l'aide sociale. 

"Augmentez votre consommation de fruits/légumes, madame". Bonne idée docteur, mais le budget disponible est minuscule. 

Je ne dis pas que c'est au médecin de régler ce genre de problème, mais je pense qu'il devrait prendre en considération le contexte de vie du patient, car plusieurs facteurs influencent drôlement sa santé.  
 
Vivre avec l'EM rime-t-il avec vivre la pauvreté?
Si l'on veut être honnête, il faut bien admettre que souvent c'est le cas. 
Malheureusement. 

Et les incidences de la pauvreté sur la vie des PAEM sont bien réelles.


Bonne lecture,

Mwasi


P.S. Je reviens d'une super vente à l'Armée du salut. J'ai parfois des problèmes de conscience avec cet organisme, car c'est une multinationale! J'essaie autant que possible, d'encourager les mêmes commerces québécois. J'ai dégoté une jolie veste 100% laine, à 2$. Il y a quand même de ces trouvailles quand on vit modestement :)

mardi 11 octobre 2016

Vivre avec l'EM et les bruits environnants.

Il m'a fallu beaucoup de temps avant de comprendre combien les bruits environnants me dérangeait, et surtout, d'en comprendre la cause.  

Après tout, à moins de savoir avec quelle maladie nous vivons, il est difficile de faire le lien entre l'agacement, le dérangement que nous causent les bruits ET le fait de vivre avec l'encéphalomyélite myalgique. Je ne saurais vous dire quand exactement j'ai compris le lien entre les deux: tout ce dont je me rappelle, c'est qu'une fois que j'en ai eu compris les raisons, j'ai ressenti un grand soulagement.

Je savais enfin pourquoi les bruits me rendaient très nerveuse et mal à l'aise dans mon corps.

Vivre avec un environnement bruyant peut être épuisant, stressant. 

Pourquoi?

Parce que lorsque je marche dehors, il y a toute sortes de bruits: camions, tondeuses, bétonnières, voiture dont le silencieux est défectueux, etc. Quand j'entends ces bruits près de moi, mes battements cardiaques accélèrent, et ça résonne dans ma tête comme une caisse résonance: les décibels sont trop élevés pour moi. Parfois l'effet est si fort, que je marche plus vite sans même m'en rendre compte, pour fuir les bruits le plus vite possible. 

Je ne sors pas sans ma petite collection personnelle de bouchons pour les oreilles, et je choisis selon le niveau de bruits. 

Super madvac ultra bruyant :(   l'horreur
Je vous présente l'aspirateur de rues de Montréal, le Madvac!

Croyez-moi, il porte très bien son nom: le bruit que fait cet engin sur les trottoirs de notre chère ville est tellement fort, c'est vraiment à devenir fou, sérieusement "mad". 

D'ailleurs, j'ai remarqué que les conducteurs de ces engins portent de gros écouteurs pour protéger leurs oreilles. Imaginez ce que le bruit donne pour les piétons qui passent à proximité :) 

Quand j'en vois un qui se profile au loin sur le trottoir, je change de côté de rue. 

Vite, fuir la bête!

Ouf..........

J'ai noté que ces derniers mois, cette intolérance aux bruits environnants a augmentée. Notamment, j'ai remarqué que j'écoute beaucoup moins de musique qu'autrefois. Peut être n'est-ce pas cette fragilité aux bruits, mais je ne peux m'empêcher de me demander si ce n'est pas lié à cette intolérance. On dirait que même la musique, si douce soit-elle, ne m'attire pas. Ce qui ne me ressemble pas. Ou plus, disons.

Voici les bruits qui me dérangent: 

-Bétonnière
-le fameux Madvac
-Benne à ordures et camions de recyclage (au secours!)
-Camion qui pompe les égoûts (ah mon dieu!!!!!!!)
-Tondeuses à gazon (direct dans le cerveau!)
-Souffleur de feuilles, gazon etc. (pourquoi cette invention au juste?!)
-Pétarades de moto (tout plein dans mon quartier :(  
-Scie mécanique et que dire des coups de marteau?  (fuyez les bricoleurs du dimanche :(
-Sirènes de pompiers, d'ambulances (aucun contrôle :(
-Klaxons
-Bruits de fonds de centres commerciaux  (max. 30 min)
-Bruits de fonds de restaurant :(
-Bruits de salles de rencontre (où est la sortie??)
-Discussions où il y a plusieurs personnes: plus de deux, c'est très dur :(

Mon visage se crispe.
Mon corps se contracte, se referme sur lui-même.
Mon coeur bat la chamade.
Mon énergie brûle rapidement, car mon corps est "sur les dents", réaction de survie face aux bruits.

Je me suis demandée s'il me fallait désormais vivre sous une belle grosse cloche de verre très épais au travers de laquelle les bruits ne passeraient pas. Tiens, est-ce que je ne me répète pas, ici? Je crois avoir déjà écrit cela....

Sérieux. 
Mis à part de déménager un jour dans un endroit plus calme ou de porter des bouchons à vie, je ne vois pas trop ce que je peux faire d'autre.

C'est désagréable, épuisant, stressant, et mon niveau d'énergie chute rapidement quand je suis plongée dans ces bruits dérangeants. 

Du moins, je sais maintenant pourquoi ces bruits me dérangent autant. Il y a plusieurs personnes affectées par l'encéphalomyélite myalgique qui vivent cela, sans pourtant en connaître la cause.

Que l'on soit affecté par l'EM ou pas, nous vivons tout de même dans un univers où les bruits sont souvent trop forts et omniprésents. On n'en meurt pas, bien sûr, mais il y a des conséquences à endurer trop de bruits.

Mais mine de rien, nous gagnerions à vivre dans un monde où il y aurait moins de bruits, ne serait-ce que pour tous nous détendre, vivre en diminuant cette source de stress des plus insidieuse sur notre santé à tous.


Bonne journée,

Mwasi