mercredi 7 juillet 2021

Lettre à mon corps

 



Bien cher corps,

Voilà 60 ans aujourd'hui que nous vivons ensemble. 
Ça me fait tout drôle de dire ça, et encore plus de te l'écrire.

D'entrée de jeu, je veux te remercier pour ces soixante années.
Tu as toujours été fidèle au rendez-vous. 

J'ai pu vivre ma vie de petite fille, puis mes expériences adolescentes. 
Une fois devenue femme, j'ai eu la chance de vivre des grossesses et ainsi,  d'accueillir cinq belles filles devenues femmes et mères à leur tour. 
J'ai pu vivre la vie de famille à plein, et pas qu'un peu!

J'ai même eu le temps d'étudier, de développer une carrière.

Sans toi et un minimum de santé, tout cela n'aurait pas été possible. 

Il y a plus de dix ans maintenant, tu as montré des signes de problèmes de plus en plus évidents. 

Peu à peu, l'énergie a diminuée, lentement mais sûrement. 

L'encéphalomyélite myalgique, et bien d'autres maladies chroniques, ont fait leur apparition dans ma vie. 

Je n'avais pas compris que tu étais en détresse, je ne comprenais pas les signaux que tu m'envoyais...

Travailler est devenu impossible.
J'ai dû me battre pour nous, pour qu'on reconnaisse ton état de malade.
Tu es passé de l'autre côté, tu es invalide. 

Après tout ce temps, je "commence" à mieux saisir ce dont tu as besoin, à mieux m'occuper de toi. Même si parfois, ça ne m'enchante pas. Ou que mes actions ne sont pas au point.

Maintenant ça y est, je crois mieux comprendre ce qui t'arrive.
Ce qui nous arrive.




Par respect pour ta faible énergie, on ne peut plus fêter en grand.
Du moins, pas comme avant que tu ne sois malade.
Ce sera discret, simple. 
De petites touches de plaisir, pas plus.
Sous risque de te plonger dans un épuisement encore bien pire. 

Il y a 60 ans, tu faisais ton entrée en ce monde. 
Sache que je t'en suis reconnaissante. 

Même au milieu du chaos des malaises post-efforts et toute une kyrielle d'autres symptômes qui arrivent encore trop souvent, tu continues à oeuvrer. 

La preuve: quoique je fasse (ou ne fasse pas), tu continues à faire tout ce que tu dois faire. Mes reins font leur boulot, tout autant que mes poumons, sans compter mon coeur. 

Tous ces organes qui travaillent dans l'ombre. 

Je ne peux même pas écrire tout ce que tu fais, chaque jour, tellement tu travailles dur et fort.

Ok, il y a des trucs qui déraillent dans ton fonctionnement, c'est vrai.
Même si mon cerveau déraille.
Même si les douleurs attaquent sournoisement, tu es là, tu fais de ton mieux. 
Mes ongles et mes cheveux poussent, ma peau change, mon coeur bat.
Quoique je fasse d'ailleurs. 

N'est-ce pas merveilleux, tout de même?

Même avec des dysfonctionnements, toi mon corps, tu accomplis encore ta mission jour après jour. 

Merci à toi mon corps!

Je célèbre ta force, mais aussi ta vulnérabilité. 

Merci pour tout ce que tu fais si bien par endroits, et que tu continues quand même de faire, même lorsque si c'est difficile parfois. 

Ainsi, je peux encore vivre de petits doux moments (surveillance de l'énergie oblige) avec ma famille, mes amis. Et parfois même seule, puisqu'il en est ainsi maintenant.

Je peux encore jardiner à petite échelle, à petite énergie. 

Je peux encore écrire aujourd'hui, et vivre pleinement cette reconnaissance. 

Merci pour ces 60 ans! 

Merci pour tes bons et loyaux services. 
En espérant qu'on pourra continuer encore un bon bout de chemin ensemble...


Joyeux anniversaire à toi, mon corps. 

🌻