Je m’en souviens comme si c’était hier. Je venais d’avoir 43 ans.
Ce vendredi 2019, vers 16 :15, j’ai fait un malaise sur mon lieu de travail, dans ma classe. C’était une grippe sévère. Mon corps m’a lâché et ma vie a basculé.
Je pensais que cette grippe passerait au bout de quelques semaines. Malheureusement, il n’en a rien été. Pire, mon état s’est dégradé au fil des mois. Après une année d’errance médicale, je suis enfin diagnostiquée en 2020 : je suis atteinte d’encéphalomyélite myalgique (EM) au stade sévère.
Depuis 3 ans d’EM, j’ai plein d’envies, mais je ne peux les réaliser. 3 ans en position horizontale face à mon plafond, c’est long.
Ce sont des envies très simples :
Je voudrais réussir à rester assise 15 minutes sans me trouver mal et être obligée de m’allonger.
Je voudrais aller dans mon jardin voir les fleurs. Je ne suis pas allée dans mon jardin depuis 3 ans. Je suis coincée à l’étage de ma maison depuis 2 ans.
Je ne peux plus monter d’escalier. J’aimerais tenir une conversation au téléphone en étant certaine de ne pas déclencher un malaise post-effort qui durera 24 à 48 heures.
J’aimerais pouvoir lire un roman, c’est impossible avec mes difficultés de concentration et ma vision floue.
J’aimerais partager des activités avec mon fils, jouer, discuter avec lui, sans avoir un mal de tête au bout de 5 à 10 minutes.
J’aimerais pouvoir faire plus de 20 pas d’affilée sans être obligée de m’effondrer sur une chaise ou par terre.
J’aimerais pouvoir couper ma viande toute seule et manger sans faire tomber ma fourchette.
J’aimerais me lancer dans le dessin et la peinture, écrire ce que je vis ou de jolies choses comme des poèmes, mais je n’arrive pas à rester assise.
J’aimerais pouvoir supporter les sons de mon entourage et les bruits de dehors. J’ai développé une intolérance aux sons qui est incroyable, et qui m’oblige à porter un casque antibruit.
J’aimerais reprendre mon métier de professeur des écoles que j’aimais tant. C’est impossible. Dépendre financièrement de mon conjoint : c’est difficile à accepter.
J’aimerais revoir ma famille et mes amis. Ils me manquent tant. Depuis 3 ans, je ne suis plus présente aux rassemblements de famille et d’amis. Je ne peux plus me déplacer, même dans une voiture.
Voilà. Mes envies sont simples. Mais irréalisables.
Je demande aux autorités sanitaires de France une vraie bonne prise en charge de l’EM. Je n’ai pas l’allocation longue durée (ALD). Je souhaite être reconnue malade de cette pathologie.
Je souhaite que tous les médecins français soient formés à cette maladie. Ce ne sont pas des exercices physiques qu’il faut prescrire aux malades de l’EM. Ces exercices physiques aggravent l’état de santé de ces patients. J’en ai fait l’expérience. C‘est la stratégie du pacing qu’il faut prescrire aux malades.
Je souhaite que les chercheurs et scientifiques du monde entier travaillent en collaboration afin de trouver un remède.
Je souhaite guérir, car j’ai promis à mon enfant que je jouerai de nouveau au football avec lui.
Laëtitia
Rennes, France