jeudi 28 août 2025

Appel à participation mondial pour les personnes affectées par l'encéphalomyélite myalgique




APPEL À PARTICIPATION


📷 Exposition "Territoires de l’EM" –
📍 Galerie à Reims en France, en novembre et décembre 2025

Nous, Laure Tillion et Marie Lacotte (alias Marie Clem sur Facebook), vous invitons à découvrir notre exposition photographique :

"Territoires de l’EM"

À travers nos images, textes et une installation, nous explorons les lieux de vie imposés par la maladie :
le lit, la salle d’attente, les espaces silencieux et contraints.
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Le lit comme territoire

Dans l’EM, le lit devient parfois le seul espace habitable.
On y passe les heures, les jours, les saisons.
Mais il peut aussi devenir un lieu d’idées, d’attention, de présence.
> "On y dort, on y crée, on y pense, on y fait des plans, on s’y recharge."
Privé·es de travail, de liens sociaux, d’intimité, nous devons tout réinventer, dans l’immobilité et le silence.
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VOUS POUVEZ PARTICIPER À L'EXPOSITION :

Nous lançons un APPEL À PARTICIPATION PHOTOGRAPHIQUE pour que d’autres lits, d’autres vécus, puissent être partagés dans cette œuvre collective.

Ce que vous pouvez photographier :

Vous-même avec un masque de repos (obligatoire)
Casque audio, machine à oxygène, objets personnels, instruments…
Plantes, livres, collections
Proches, animaux, soignants (yeux ouverts, comme s’ils veillaient sur vous)
Autoportrait possible
Plusieurs photos bienvenues (angles différents)

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Et si vous êtes en état très sévère ?
Une simple photo dans la pénombre suffit.
Ce que vous traversez a toute sa place. Il est essentiel que cette réalité soit visible.

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Merci d’ajouter à votre envoi :

Prénom
Profession ou activité passée
État actuel de la maladie
Ce que vous aimiez faire
Vos 5 chansons préférées

Prénoms + liens des personnes ou animaux sur la photo
📬
Envoyez vos photos par mail à : laureguelle@9online.fr
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De préférence via SwissTransfer (valable 1 mois)

⏳
Vous avez 2 mois pour participer — prenez votre temps, sans pression.
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POURQUOI CETTE EXPOSITION ?

« Le contact des vêtements contre ma peau m’a fait m’évanouir dans mon lit. »

Notre travail artistique part de l’intime, du quotidien entravé, des espaces contraints par l’EM.

Du lit à la salle d’attente, nous montrons une réalité fragmentée, parfois figée, souvent silencieuse.

Cette exposition est une prise de parole visuelle.
Pour dire ce que la maladie rend invisible.
Pour faire exister ce qui est tenu caché.
Pour dessiner ensemble les contours d’un territoire vécu,
celui de l’Encéphalomyélite Myalgique post-Covid ou non.
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📢
Merci à tous pour votre participation et de faire circuler largement cet appel.

mercredi 27 août 2025

Microscopique

 

Après une courte balade dans le quartier, je décide de passer par le petit parc près de chez moi. 

Je m’assois sur mon déambulateur, directement dans la pelouse. 

Doucement, je regarde autour de moi.

Je lève la tête.

J’aperçois les canopées des arbres qui se balancent dans le vent chaud de cette fin d’été, et où s’entremêlent les rayons du soleil.

Mon corps se détend, lentement.

Lentement…

C’est microscopique, et pourtant…

Je ferme les yeux.

Je savoure ce micromoment de bien-être dans mon corps. 

Oui, un micro-moment…

Un rare sentiment d’harmonie avec mon corps tendu et en douleurs quasi en permanence. 
 
Je me laisse emporter par les bruits ambiants

Des voitures circulent

Les enfants piaillent dans les aires de jeux

Ces micromoments d’arrêts sur image me permettent de savourer ma vie, même en vivant avec des maladies chroniques.




Tout ce qui reste de macroscopique dans ma vie, c’est l’énorme quantité de repos dont j’ai besoin pour arriver à être minimalement fonctionnelle. 

Mon corps n'arrive plus à tolérer l'intensité: de grandes joies ou de grande peines sont comme des poisons. Mon corps est envahi d'adrénaline et lutte pour rétablir son fragile équilibre. 

Vivre avec l’encéphalomyélite myalgique demande des ajustements constants: c’est mon corps qui dicte de quoi seront faites les heures de la journée. 

Comme je ne saurais prévoir son degré d’énergie, le niveau d’inflammation ou les douleurs à venir, il me faut être à l’écoute. 

C’est ma grande priorité : être à l’écoute de ce corps, une minute à la fois. 

Dans mon esprit, je mets la loupe sur tout ce qui est microscopique et qui peut combler mon cœur de plaisir, ne serait-ce quelques instants, ou soutenir mon corps qui lutte chaque heure de sa vie avec tout le cortège de malaises et de tensions. 

Microcospique ne veut pas dire inutile ou inefficace, loin de là. Car, en additionnant les micromoments, mine de rien, l’effet de cumul se fait sentir en moi. 

Je collectionne ces micromoments dans mon esprit. 

Quand ils se produisent, je mets en branle cet esprit afin qu'il se concentre sur les détails tels que les sons, les odeurs, les sensations dans mon corps. 

Pour s'en rappeler..

Je me crée ainsi un livret de ces tous petits souvenirs à se remémorer et qui font du bien à l’âme, quand ça va moins bien. 

Les personnes affectées par l'encéphalomyélite myalgique vivent à l'envers du monde actuel où tout va à grande vitesse. Ce qui est microscopique semble mieux nous réussir.

Mais qu'on ne se trompe pas: ce n'est pas parce que le microscopique nous réussit mieux que nous n'avons pas de besoins macroscopiques. 

Nous avons des besoins macroscopiques en termes de soins, de suivi médical approprié et efficace. De reconnaissance médicale, aussi, bien entendu.

Nous avons des besoins macroscopiques d'amour, de compréhension, de tendresse, de sécurité et d'affection. 

Nous avons des besoins macroscopiques d'être compris et soutenus autant par nos familles, les conjoints ainsi que les médecins. 

Je nous souhaite à tous du microscopique pour arriver à vivre et survivre, mais aussi du macroscopique pour nous soutenir dans la maladie.


🌻


 
 


mercredi 20 août 2025

"Imaginez"...par Christine Noël



IMAGINEZ ne plus pouvoir parler pour demander à boire, à manger, à l'aide ou juste que vous avez trop froid ou exprimer ce que vous ressentez. 

IMAGINEZ ne plus être capable de vous asseoir, de vous lever pour marcher jusqu'aux toilettes, de vous tourner seul dans votre lit, de soulever votre bras pour soulager une crampe parce que vous n'en avez pas la force. 

IMAGINEZ avoir la tête qui explose à chaque bruit du quotidien, à chaque lumière, avoir envie de hurler de douleur si on vous touche sans pouvoir le faire comprendre à ceux qui vous entourent. 

IMAGINEZ ne pas parvenir à manger seul, ni même aspirer quoi que ce soit à la paille, devoir être alimenté à la pipette, uniquement par du liquide car vous n'avez plus l'énergie de mâcher quoi que ce soit, votre estomac ne parvient plus à digérer non plus et les nausées sont incessantes. 

IMAGINEZ que votre corps tremble sans cesse, pris de secousses incontrôlables qui vous épuisent davantage. 

IMAGINEZ...

IMAGINEZ que votre corps ne vous appartient plus. On vous change les couches dans lesquelles vous urinez, defequez sans avoir aucun contrôle. On vous nettoie, votre corps exhibé dans sa déchéance. La pudeur n'existe plus quand on est en EM à un stade très sévère. 

MAGINEZ ne plus avoir la force d'ouvrir les yeux, vos paupières clouees comme du ciment, seule fenêtre sur un monde qui vous a oublié. 

IMAGINEZ vivre ainsi jour après jour, des semaines, des années, des années, dans la gêne, l' indifférence, l'ignorance de ceux qui devraient vous aider. 

IMAGINEZ...

Mon fils de 11 ans n'imagine pas. 

Il le vit depuis bientôt 3 ans. Il vit l'impossible, sous les yeux impuissants de sa famille. 

Il partage la détresse de millions de malades de l'EM dans le monde. 

J'imagine des pouvoirs publics qui forment les professionnels de santé sur cette pathologie, qui engagent des recherches à hauteur de l'enjeu au lieu de se boucher les oreilles, qui offre des structures pour proposer des soins afin de soulager la douleur de ces malades. 

Le 8 août 2025, journée mondiale de l'EM severe j'imagine un monde qui n'offre pas aux malades qu'une seule issue : la mort assistée.



Christine Noël
Marseille, France

lundi 11 août 2025

Mon fauteuil roulant, cet allié précieux





Acheté l’été dernier, j’apprécie de plus en plus mon fauteuil roulant. Peut-être est-ce dû au fait que je me suis laissé le temps de bien l’apprivoiser, et mon corps de s’y adapter.

Les premiers mois de son utilisation, j’avais remarqué combien mon corps était crispé. Je comprends mieux pourquoi maintenant. 

Entre autres, Il y a deux raisons : c’est que les trottoirs de mon quartier sont vraiment dans un piteux état, rempli de trous et mal entretenu.  Je ressentais donc tout ça à travers la chaise, et dans mon corps. Un peu normal d’être crispée! 
Il m’a fallu un temps d’adaptation pour m’y faire. Aussi, à force de me balader, j’ai maintenant en tête une sorte de carte géographique du quartier où je sais que certains trottoirs sont moins détruits. Certains sont neufs, mais ce n’est qu’une petite partie. 

Une fois que j’en ai pris conscience, je suis mieux à même de décrisper mon corps. Maintenant, je sens que je fais corps avec le fauteuil sans être amochée. 
J’utilise encore mon déambulateur de temps à autre, comme je l’expliquais à ma médecin de famille récemment. Elle s’inquiétait du fait que je n’utilise que le fauteuil au détriment de la marche. 

C’est là, d’ailleurs, que j’en ai profité pour lui expliquer comment je fonctionne au quotidien. Si je me sens assez d’énergie pour marcher dans mon quartier avec mon déambulateur, je le fais. Ça peut être juste d’aller au coin de la rue, lentement. J’aime encore et toujours marcher! 

D’ailleurs ça me manque. Ça me rappelle que, lorsque je travaillais, je me rendais au bureau en marchant, musique aux oreilles. J’aimais tellement ces moments! 
Retour à la réalité : lorsque j’utilise mon déambulateur, il n’est pas rare de voir ma fréquence cardiaque grimper jusqu’à 145 battements par minute (BPM). Même si cela ne dure pas longtemps, il reste que c’est un effort beaucoup trop intense pour le corps quand on vit avec l’encéphalomyélite myalgique. C’est suite à ce constat, justement, que j’ai décidé d’acheter mon fauteuil, même sans l’appui de mon médecin. 

Dommage, mais parfois, il faut se choisir en toute connaissance de cause. 

Ce matin, par exemple, je me suis rendue faire des achats à l’épicerie de quartier. Au départ, j’avais prévu d’utiliser le déambulateur. Pendant mon temps de repos dans ma chaise zéro gravité avant de sortir, j’ai réalisé que : 1) ma fréquence cardiaque était trop élevée, même pendant le repos  2) il fait 28 degrés avec un humidex de 33 degrés. C’est trop chaud, et je préfère limiter mon temps d’exposition à la chaleur intense actuelle.

Ces deux conditions m’ont fait changer de plan, et j’ai plutôt choisi d’utiliser le fauteuil. Ce fut une sortie courte, mais qui m’a fait quand même du bien : juste le fait de sortir un peu de la maison, voir des gens, acheter des petits trucs, j’ai eu ma petite dose de sortie. 

Le bonheur…c'est que

-ma fréquence cardiaque n’a pas grimpé dans les rideaux! J’ai donc donné de bonnes chances à mon corps de conserver l’énergie. Moins de risque de malaise post-effort. 



En utilisant le fauteuil, ma fréquence est acceptable.
Ici, celle de ce matin après les courses. 
Mon seuil anaérobique est de 73 BPM, dépassement léger.



-je me suis procuré des fruits/légumes frais sans me vider de mon énergie, et en toute autonomie. Même si ce fut court, c’était plaisant.


La couette au vent, je savoure chaque moment à l’extérieur passé dans ma chaise. Je n’aurais jamais pensé éprouver cela un jour : d’ailleurs, comment aurais-je pu y penser? Mes plans d’avenir ne me conduisaient pas dans cette direction, c’est-à-dire le fait d’être malade et déclarée invalide.





Ici, vue de ma chaise de face et de dos. Je me suis assurée d'être bien visible avec cette veste de sécurité qui recouvre un sac à dos installé dessous. Avec des bandes velcro, le sac à dos me permet de ramener certaines courses pas trop lourdes. Ça m'aide vraiment beaucoup quand j'arrive à sortir de chez moi et que je ne suis pas trop épuisée. 

J'ai été agréablement surprise, une fois à l'épicerie, de me faire demander par des commis si j'ai besoin d'aide pour faire les achats. J'ai vraiment apprécié qu'on me le demande. 

Je n’utilise pas de rampe pour le sortir de chez moi. Avec l’ergothérapeute, on a vite compris que l’utilisation d’une rampe pliante n’était pas possible : déplier et replier la rampe, c’est une grosse dépense énergétique en soi, même si elle avait été une rampe temporaire. J’habite dans un logement dans un rez-de-chaussée, et une rampe permanente ne pouvait pas non plus être installée, car elle aurait empiété sur une partie du trottoir qui appartient à la ville de Montréal. 

La meilleure façon de procéder pour sortir ou faire entrer mon fauteuil  roulant est encore de le laisser ouvert, de le saisir par le dossier et de le faire rouler sur les 3 petites marches de mon palier. 

Soulever le fauteuil une fois qu’il est plié est impossible, car il pèse environ 43 lb. Une fois dans la maison, je le fais rouler sans le soulever et je le branche sur sa recharge.

Dans les faits, je peux utiliser mon fauteuil à partir d’avril ou mai (s’il n’y a pas eu de tempête tardive) jusqu’à novembre et même décembre si je me fie à l’expérience de l’an dernier. 

L’hiver, je ne n’utilise pas mon fauteuil à l’extérieur, sauf quand je vais à mes rendez-vous médicaux. Les sels et abrasifs utilisés par la ville me font redouter le pire, et je préfère sauvegarder mon fauteuil. 

Quand c’est l’hiver pur et dur, je demande davantage de l’aide de mon entourage pour les courses. Et je reste bien tranquille à la maison, à me reposer. 

Parfois je suis si épuisée que je ne peux utiliser ni mon fauteuil roulant, et encore moins mon déambulateur. Alors je me repose, et ça prendra le temps que ça prendra...pour sortir à nouveau. 

À l'automne l'an dernier, j'ai tellement aimé me balader dans l'air frais et les jolies couleurs des arbres! 

Je ne me passerais plus de ce fauteuil tellement il est précieux. Il fait maintenant partie intégrante de mes déplacement, quel que soit l’endroit où je désire aller. Je dois admettre que je n’ai pas accès à tous les commerces que je voudrais, car bien des édifices n’ont pas adopté l’accessibilité universelle dans mon quartier. Les "essentiels" tels que pharmacie, épiceries et CLSC ont tous des portes à ouverture automatique, dieu merci.

Quand je suis en ligne pour payer des courses, et que je vois les gens attendre debout, je compatis. 

Confortable dans mon fauteuil, je me remercie en silence d'en avoir un...


Je vous souhaite une belle fin d'été


🌻