jeudi 18 août 2022

Gratitude

 


Le bonheur n'est pas toujours dans un ciel éternellement bleu, 
mais dans les choses les plus simples de la vie -Confucius 


Il y a cette gratitude qui monte en moi par moments, comme des bulles. 
Subtilement, sans bruit. Une reconnaissance se pointe lorsque je vis de doux moments.

Je ferme alors les yeux et je savoure l'instant. J'imagine alors une jolie couleur qui s'étale sur mon corps et empli aussi mon esprit. Je me fais des provisions de douceur et de bonheur. 

Car oui, il y en a de ces moments doux malgré et avec la maladie. Assise au parc ou dans ma cour, à savourer la douceur du temps. Lire un beau texte. Ou juste me reposer, fermer les yeux et respirer lentement. 
 
Je ne sais pas si c’est l’âge, la thérapie débutée il y a un an, ou la combinaison des deux, mais je me sens bien. 

Je ressens de la gratitude pour toutes sortes de raisons
J’ai un toit sur ma tête
J’ai de quoi vivre
Je suis en sécurité
J’ai une famille. Des amis. C’est déjà beaucoup...
 
Je vis avec plusieurs maladies, soit.
Je vis avec beaucoup de douleurs et d’inconfort, soit. 
Je vois un paquet de médecins et de spécialistes, soit. 
Je ne sais pas toujours où et à quoi ça me mène, soit. 
Les coups durs de la vie ne manqueront jamais de se produire. 
N'empêche, dans le fin fond de ma personne, je me sens bien. 
 
Tout cela est ma vie, mais pas que ça. 
Je suis reconnaissante parce que j’ai le temps et le loisir de réfléchir, de penser.
Ce que plusieurs n'ont pas le luxe de faire. 
Je peux prendre tout le temps voulu pour prendre soin de moi.
J’ai la chance immense de pouvoir — enfin — vivre à mon propre rythme. 
Je peux décider de faire ce que je veux, quand je le veux.
Même s’il y a certaines contraintes, je sais m’en accommoder.
Et si le corps ne suit pas, ce n'est pas grave.
Je ralentis, je lui donne ce dont il a besoin.

J'ai la chance de pourvoir m'attarder davantage sur les petits détails de la vie, sur les très petites choses qui souvent, passent inaperçues tel le sourire d'un commis qui le fait rarement ou quelqu'un qui me tient la porte, gentiment. 

J'observe et analyse les événements du monde avec ma lunette. Je réfléchis à la suite et aux conséquences sur les communautés, les personnes. 

Je m’accorde aussi tout le repos nécessaire. Si je décide de ne rien faire, eh bien ce sera ainsi. Je suis libre, libre et heureuse. 
 
Je suis reconnaissante aussi car j’ai les ressources intérieures pour vivre et faire face aux problèmes. Et si je n’avais pas la ressource qu’il faut, je sais aller chercher de l’aide. C’est une richesse dont je suis reconnaissante. 
 
Je suis aussi reconnaissante, car quoi qu’il advienne de ma santé, j’ai eu le temps d’être mère et grand-mère. J’ai eu la chance d’avoir une vie professionnelle riche, même si elle s’est terminée trop tôt et que j’en voulais encore plus. 

J’ai eu la chance de vivre toutes ces expériences. Ce sont des pépites d'or que rien ni personne ne peut m'enlever, pas même la maladie. 
 
Quoi qu’il advienne de la suite des choses pour moi, je suis reconnaissante de la vie que j'ai. Même en vivant avec l'encéphalomyélite myalgique. 

🌻


dimanche 31 juillet 2022

Vivre avec un déambulateur: la suite.

 


En mars dernier, je publiais un billet sur l’achat de mon déambulateur. Voici la suite et où j'en suis avec mon expérience. 

Petit rappel: j'utilise une canne depuis quelques années pour me déplacer. Depuis la fin de 2021, je ressens de plus en plus de difficulté à rester debout sans bouger. Aussi, je suis en perte de vitesse avec l'énergie également d'où le choix du déambulateur pour m'aider. Ça reste à être confirmé avec mon neurologue bientôt, mais je soupçonne faire de l'hypotension orthostatique.

Tout doucement, je m'adapte à l'utilisation de mon déambulateur. Pour être honnête, j'avoue avoir sous-estimé le temps d’adaptation physique et émotionnel que cela demande de se promener avec, et de se sentir vraiment à l'aise. 
 
Tout d’abord, j’ai commencé par l’utiliser un jour ou deux semaine, en alternance avec la canne. Depuis, j'ai augmenté son utilisation pratiquement à chaque jour.  Mais avant d’être vraiment confortable, je me suis rendue compte que je poussais mon déambulateur comme si c’était une poussette. Je le tenais à bout de bras, forçant ainsi beaucoup trop mon corps, comme si j'avais encore ce réflexe de pousser un enfant. Bien entendu, j’étais plus fatiguée à cause de la posture étrange  adoptée sans vraiment m’en rendre compte. Une fois que j’en ai pris conscience, je marche en rapprochant plutôt le déambulateur vers moi, et non l'inverse. Depuis, ça va nettement mieux ainsi. 
 
La joie de se promener en déambulateur, c’est comment dire? 
 
...c’est le plaisir de tenir les deux poignées, de pouvoir lever les yeux et de regarder attentivement tout autour de moi, sans surveiller constamment le trottoir pour savoir où je mets les pieds, et surtout, sans crainte de tomber. C'est aussi moins demandant en énergie, car je marche droit et non pas en zigzag ou en crabe. 
 
...c’est aussi le plaisir de marcher encore, à mon rythme, et de m’asseoir quand j’en ai besoin. Que ce soit au niveau du trottoir ou ailleurs, j'applique les freins et je m’assois. Avec une canne, je cherchais constamment où se trouvaient les bancs publics pour m’y asseoir et prendre une pause. Avec le déambulateur, la recherche de bancs terminée!
 
...c’est aussi le bonheur de ne plus faire la file debout, ce qui est passablement difficile quand on vit avec l'encéphalomyélite myalgique. Hier par exemple, j’attendais qu’un commis d’épicerie renfloue le comptoir de viandes en rabais. Je me suis assise sur mon déambulateur pendant vingt minutes, au frais, sans soucis. Que demander de mieux? Attendre assise: une grosse économie d’énergie à mon actif.
 
Un autre bonheur que je reproduis à souhait : je roule jusqu’au petit parc près de chez moi. Avec un livre, ma bouteille d’eau, des fruits, le vent dans mes cheveux, il y a tout plein d'écureuils et d'oiseaux autour de moi. J’admire le tout en prenant de bonnes respirations : c’est le moment d’être entièrement présente et de savourer. Pas si mal la vie, finalement, avec ce déambulateur...
 
Pour le moment, je n’ai pas encore essayé la deuxième fonction du déambulateur, soit la transformation en fauteuil roulant. Mais d’ici l’automne, je compte bien l’essayer. Encore faut-il que quelqu’un me pousse!
 
Je ne peux ignorer que se mouvoir en déambulateur comporte des défis. Comme nous le savons, bien des commerces n’ont pas de portes automatiques, et je me retourne pour pousser la porte avec les fesses! Pas pratique du tout. Parfois, une âme charitable ouvre la porte pour moi, mais je ne peux pas toujours compter là-dessus.
 
L’autre hic, c'est l'absence de rampe d’accès à plusieurs endroits. Les escaliers sont un défi auquel je ne peux pas m'attaquer pour le moment.  Je n’ai pas encore tenté non plus les transports en commun avec mon déambulateur, un défi passablement plus élevé. On sait par exemple, que le métro de Montréal comporte bien peu d'ascenseurs pour les personnes à mobilité réduite. Aucune idée si je tenterai un jour l'expérience ou pas, mais je ne suis pas très tentée pour le moment, à vrai dire.
 
Une petite anecdote. Alors que je roulais avec mon engin, j’ai croisé une maman avec sa fille dans sa poussette. La petite s’est mise à dire : « regarde maman, une poussette ». La maman et moi avons bien ri. J’ai expliqué à la petite que c’est une sorte de poussette pour les grand-mamans. 
 
En terminant, j’ai songé qu’il y a à peine quelques années, je marchais mes nombreux kilomètres par semaine pour me rendre au travail. J'étais en santé, et rien n'aurait pu me convaincre du contraire.  

Je suis bien loin de cette époque.La différence cette fois, c'est que cette pensée ne m'a pas pincé le coeur comme il y a quelques temps. Je suis plutôt restée avec un léger sourire et un sentiment de sérénité. 

Après tout, j'ai marché et vécu ces kilomètres dans une toute autre vie...

🌻
 
 

lundi 4 juillet 2022

Ô Nature



"Va prendre tes leçons dans la nature." -Léonard de Vinci


J'ai la chance de vivre dans un quartier et un environnement relativement vert. Mes voisins verdissent et fleurissent également, ce qui rajoute à mon bonheur. Au fil des jours, je croque les photos de ces fleurs croisées au hasard de mes petites balades. Certains parterres sont remplis de fleurs, d'herbes et d'insectes divers qui bourdonnent: c'est rempli de vie, de couleurs et de mouvements. Je ne me lasse pas de prendre des images de ces beautés qui me ravissent, pratiquement au pied de ma porte ou pas très loin. 

Une des leçon de la nature à laquelle je pense, c'est que rien ne dure. Tout passe, que j'y pense ou pas. La preuve, ces étonnantes beautés colorées étaient enfouies sous le neige, il y a si peu de temps. Qui aurait pu soupçonner leur présence et leur étonnante évolution ensuite? Et pourtant, elles partiront comme elles sont venues. 

Même leçon pour les insectes. Une vie enfouie, une vie au soleil et hop, elles disparaitront. Pourtant, ça grouille, ça pullule et sous peu, la fin. Tout ce grouillement est intense et ne se pose certes pas de question sur la météo, le taux de change etc. Non, ça vit dans le moment présent. Point. Alors, autant profiter amplement de toutes ces belles créations et créatures de la saison estivale. 

Et vous, quelle-s leçon-s en tirez-vous?

J'espère que ces images vous inspireront autant qu'elles le font pour moi. Je vous souhaite un bel été en douceur et en couleurs. 










Pois mange-tout semés dans des boites à fleurs, sur la rue. 







Le tilleul du voisin, juste au-dessus de ma petite cour.
Une odeur merveilleuse et sucrée s'en dégage.






mardi 28 juin 2022

"Renoncer", par Hélène F.




RENONCER pour éviter absolument le malaise Post-Effort. Comprendre le mécanisme de ma maladie, l'encéphalomyélite myalgique. Accepter une vie lisse, tranquille, sans plus sortir de chez moi. 

Ne rester présente que pour mon entourage immédiat. 

Oublier la vie sociale à l'extérieur. Organiser mon intérieur. J'ai beaucoup d'aides, ouf. 

RENONCER pour faire du repos forcé. S'allonger pour des pauses de plus en plus longues entre de si faibles activités. Différer tout à nettement plus tard. Accepter de dîner avec mes enfants, allongée sur le canapé. Modifier mes priorités. 

RENONCER ENCORE PLUS malgré le pacing déjà omniprésent depuis des mois. Limiter aussi les efforts de concentration, les émotions. Tenter de stopper cette lente et irrémédiable aggravation. 

PLONGER vers toujours plus de dépendance. Être totalement alitée des semaines entières. Se sentir digne et belle malgré les toilettes faites au lit. Ma tête engluée est là, mais mon corps m'échappe. 

RENONCER pour ne pas glisser encore. Je coule vers l'état très sévère. Ne plus tenir assise longtemps. Je ne suis bien que allongée au calme. Ma tête me fait si mal. 

RENONCER TOUJOURS PLUS pour ne pas m'aggraver. Mes amis rentrent désormais directement chez moi. Ils s'assoient près de mon lit, m'aident, ne restent pas longtemps pour me préserver. Oubliés les goûters dans mon jardin! 

RENONCER. 

Et pourtant, je coule. 
J'ai peur. 
JE NE VEUX PAS PLONGER. 



Hélène F.
Massy, France 


jeudi 23 juin 2022

"Cette maladie m'a tout pris": le témoignage de Nathalie



Cette maladie m’a tout pris


Tout ce que j’avais bâti, tout s’est envolé. 
J’avais une vie. J’avais des projets.
Avant que je ne tombe malade, j’étais une femme qui aimait vivre. 

J’aimais le mouvement. J’adorais danser, crapahuter dans les montagnes, voyager, jouer avec mes enfants. Mais aujourd’hui, tout ça, c’est du passé. 

En 2019, je suis tombée malade. 

Tout ce qui raisonnait en moi, tout ce qui me faisait vibrer, tout allait être brisé.
J’allais être terrassée par la fatigue avec en prime, de nombreux symptômes qui s’y ajoutaient. 

Tout devenait difficile. 

S’occuper de mes 2 enfants devenait un exploit de chaque jour. 
Psychomotricienne, je perdais mon cabinet libéral. 
Tous les actes de la vie quotidienne m’étaient quasi impossibles. 
Ma vie est à l’arrêt. 

À cause de cette fatigue inexpliquée, j’ai consulté d’innombrables spécialistes. 
Tous mes résultats médicaux étaient normaux. 
De ce fait, les médecins préconisaient une réadaptation à l’effort. 
En mode combattante, je commençais cette rééducation. 
Je voulais guérir et reprendre le cours de ma vie. 
Du coup, le mot fatigue n'existait plus. 
Je n'avais plus de force, plus d'énergie. 
Je suis restée plus de 10 mois dans ma chambre, dans la pénombre et le silence. 

Pendant tout ce temps, aucun soin ne m’a été apporté. 
Je ne pouvais même plus me lever. Je ne pouvais pas me déplacer. 
Incapable de bouger. Le moindre geste était un défi. 
Tellement léthargique, pas même la force d’aller voir un médecin. 
Seule face à ce qui m’arrivait. 

Il a fallu 3 ans pour que le diagnostic tombe.
Je souffrais d’encéphalomyélite myalgique. 
Depuis ce jour, je survis. 
Cette maladie m’a enfermée, isolée.  
Je ne sors plus. Je reste chez moi depuis maintenant trop longtemps. 
Lorsque j’essaye de faire quelque chose, cela se finit toujours par un malaise post-effort. 

Cette maladie est invisible aux yeux des autres et de la société. 
Personne ne peut se rendre compte de ce que l’on vit. 
Le mot fatigue est loin d’être approprié. 
Il est inconcevable d’imaginer les malaises qui nous envahissent et nous clouent littéralement au lit. 

Les malaises post-effort font partie intégrante de ma vie.
Comment vivre, sans rien pouvoir faire ? Mission très difficile.

J’ai espoir que la recherche avance.
Il ne me reste plus que cette option. Il faut qu’une solution soit trouvée. 
Je vis entre mes 4 murs avec cet espoir.

Une maladie multisystémique, débilitante et toujours pas reconnue en France. 
Victime de trop de psychologisation et de négligence. 
Il faut que tout cela cesse...



Nathalie, France
 

lundi 13 juin 2022

Un été de lenteur

"Je vais élever des escargots, leur lenteur m'apaise" -Patrick Gauvin


L'été sera sous le signe de la lenteur. C'est le rythme dont j'ai besoin pour vivre avec l'encéphalomyélite myalgique. La lenteur prend de l'ampleur depuis quelques mois: me déplacer, penser, rassembler mes idées, cuisiner etc. Même revenir d'un malaise post-effort est plus lent. 

Bienvenue lenteur

J'observe de près mes boîtes à fleurs, mon petit jardin. 
Ma routine quotidienne, encore et toujours, se révèle être une alliée précieuse pour conserver l'énergie. 
Je savoure même de ne rien faire...
Oui, ne rien faire
Je regarde les molécules d’oxygène circuler
J’apprécie le calme, le silence, la lenteur

Je me parle avec plus de douceur
Je me conseille même parfois à voix haute
Ne suis-je pas la personne la mieux placée pour comprendre ce dont j'ai besoin pour mon bien-être?  

Je ne sais pas si c’est l’âge ou si le fait de vivre avec l’encéphalomyélite myalgique me fait vieillir prématurément, mais j’ai l’impression de vivre dans un univers où tout ou presque est « trop ».  Trop de rendez-vous médicaux, de suivis, de consignes. Trop d’actualités difficiles à suivre etc.

Trop de trop 

Récemment, j'ai subi une IRM d'une trentaine de minutes. Ce qui m'a frappée, c'est combien je me fatigue plus vite quand je suis hors de chez moi. Me retrouver dans un hôpital ou une clinique pour un test est extrêmement énergivore. Les bruits environnants élevés de ces lieux, les consignes rapides des employés (on fait répéter), les discussions avec les clients, la manière rapide et parfois un peu brusque d'agir du personnel, tout cela me laisse sur le carreau comme si je sortais d'une tornade. Et c'est sans compter ce que représente passer un IRM: sons et lumières décuplées, stress, douleurs pendant l'examen etc.

Même si ces tests et examens sont nécessaires, j'en ressors si épuisée que je les sens comme des agressions sur mon corps. Je ne me plains pas de recevoir des services de santé, loin de là, je suis même privilégiée. Mais les impacts de ces sorties médicales ont un poids que je ne peux en aucun cas ignorer. J'ai beau me dire que j'ai de la chance d'être bien suivie,  ces rendez-vous demeurent difficiles à vivre et à "survivre" quand on vit avec l'encéphalomyélite myalgique. 

Immanquablement, le malaise post-effort s'ensuit. Et je ne suis pas en mesure de dire combien de temps sera nécessaire pour que mon corps revienne à un état "normal". 




Après ces incursions médicales, je retrouve mon petit cocon de calme et de silence avec bonheur. J'ai réussi, avec de l'aide, à aménager ma petite cour. J'alterne alors lit-divan-cour quand je suis capable. 

C'est mon lieu privé où je me régénère. La cour a beau être petite, on y trouve plantes et fines herbes. Au-dessus de ma tête, l’immense tilleul du voisin, planté trente ans plus tôt, étend ses branches chargées de fleurs. Je vis dans un petit écrin de verdure. Je savoure cette chance inouïe qui m’est donnée. Énergie faible? Je m'oxygène dans mon royaume, ne serait-ce que quelques minutes. 




Cet été de lenteur me fait aussi vivre une certaine forme de gratitude, de reconnaissance en quelque sorte. 

Ma vie est loin d'être parfaite, mais je l'aime.  J'ai la chance de pouvoir encore écrire et lire à mon propre rythme dans un bel environnement qui convient à mon état de santé. Si j'ai un problème urgent, j'ai des  personnes autour de moi qui peuvent réagir rapidement pour me venir en aide. J'ai des amis, j'ai de la famille qui m'entoure, c'est une chance inouïe. Pour tout cela et même plus, je dis merci. 

Je vous souhaite de savourer votre été où que vous soyez. Pour les personnes affectées par l'encéphalomyélite myalgique, j'espère de tout coeur que la saison estivale vous offrira un peu de répit et que vous pourrez refaire un peu vos forces

Un bel été à tous

🌻

 
 

mercredi 1 juin 2022

Le témoignage de Laëtitia: "Mes envies sont simples. Mais irréalisables".




Je m’en souviens comme si c’était hier. Je venais d’avoir 43 ans. 

Ce vendredi 2019, vers 16 :15, j’ai fait un malaise sur mon lieu de travail, dans ma classe. C’était une grippe sévère. Mon corps m’a lâché et ma vie a basculé. 

Je pensais que cette grippe passerait au bout de quelques semaines. Malheureusement, il n’en a rien été. Pire, mon état s’est dégradé au fil des mois. Après une année d’errance médicale, je suis enfin diagnostiquée en 2020 : je suis atteinte d’encéphalomyélite myalgique (EM) au stade sévère. 
 
Depuis 3 ans d’EM, j’ai plein d’envies, mais je ne peux les réaliser. 3 ans en position horizontale face à mon plafond, c’est long. 

Ce sont des envies très simples : 
 
Je voudrais réussir à rester assise 15 minutes sans me trouver mal et être obligée de m’allonger.
 
Je voudrais aller dans mon jardin voir les fleurs. Je ne suis pas allée dans mon jardin depuis 3 ans. Je suis coincée à l’étage de ma maison depuis 2 ans. 
 
Je ne peux plus monter d’escalier. J’aimerais tenir une conversation au téléphone en étant certaine de ne pas déclencher un malaise post-effort qui durera 24 à 48 heures. 
 
J’aimerais pouvoir lire un roman, c’est impossible avec mes difficultés de concentration et ma vision floue. 
 
J’aimerais partager des activités avec mon fils, jouer, discuter avec lui, sans avoir un mal de tête au bout de 5 à 10 minutes. 
 
J’aimerais pouvoir faire plus de 20 pas d’affilée sans être obligée de m’effondrer sur une chaise ou par terre. 
 
J’aimerais pouvoir couper ma viande toute seule et manger sans faire tomber ma fourchette. 

J’aimerais me lancer dans le dessin et la peinture, écrire ce que je vis ou de jolies choses comme des poèmes, mais je n’arrive pas à rester assise. 

J’aimerais pouvoir supporter les sons de mon entourage et les bruits de dehors. J’ai développé une intolérance aux sons qui est incroyable, et qui m’oblige à porter un casque antibruit. 
 
J’aimerais reprendre mon métier de professeur des écoles que j’aimais tant. C’est impossible. Dépendre financièrement de mon conjoint : c’est difficile à accepter. 
 
J’aimerais revoir ma famille et mes amis. Ils me manquent tant. Depuis 3 ans, je ne suis plus présente aux rassemblements de famille et d’amis. Je ne peux plus me déplacer, même dans une voiture. 
 
Voilà. Mes envies sont simples. Mais irréalisables. 


 



Je demande aux autorités sanitaires de France une vraie bonne prise en charge de l’EM. Je n’ai pas l’allocation longue durée (ALD). Je souhaite être reconnue malade de cette pathologie. 
 
Je souhaite que tous les médecins français soient formés à cette maladie. Ce ne sont pas des exercices physiques qu’il faut prescrire aux malades de l’EM. Ces exercices physiques aggravent l’état de santé de ces patients. J’en ai fait l’expérience. C‘est la stratégie du pacing qu’il faut prescrire aux malades. 
 
Je souhaite que les chercheurs et scientifiques du monde entier travaillent en collaboration afin de trouver un remède. 
 
Je souhaite guérir, car j’ai promis à mon enfant que je jouerai de nouveau au football avec lui. 
 


Laëtitia
Rennes, France