samedi 13 janvier 2018

Neige, neige....et l'épuisement neuro-immunitaire post-effort.



J'ai les joues rougies par le froid et la neige. Je reviens du dehors où une neige légère mais abondante nous tombe dessus. Hier, je regardais par la fenêtre de ma chambre, je pouvais voir la vieille table du jardin où subsistait un petit petit monticule de neige fondue.

Aujourd'hui, la vieille table est complètement recouverte d'une épaisse couche de neige. Comme quoi la vie -et la météo canadienne-, change parfois rapidement.

Lorsque j'étais enfant, j'étais la première dehors à vouloir me mesurer à la tempête et aux bancs de neige très élevés que cette dernière laissait derrière elle. Armée de ma pelle et de mon traineau, j'aimais enlever la neige accumulée sans faiblir ou jusqu'à ce que je tombe de fatigue. 

Ce matin, j'y suis allée avec passablement de prudence, et pour cause: je me laisse parfois emporter par le plaisir de pelleter!  L'hiver dernier, j'ai un peu trop abusé avec ma pelle, et je me retrouvais en mauvaise posture les jours suivants: muscles et articulations très douloureux, énergie faible pour 3-4 jours et même plus.

Je ne peux plus faire ce genre d'abus, et je me demande si un peu de sagesse s'est instaurée dans mon cerveau. À tout le moins ce matin, je me suis promise d'être attentive et prudente en évaluant l'épaisseur des bancs de neige.

Pelle en main, j'ai dégagé la neige du balcon en poussant sur la pelle, évitant ainsi de la soulever. Ce qui est "traitre" ou tricky" quand on vit avec avec l'encéphalomyélite myalgique, c'est qu' il n'y a pas nécessairement de message de douleur envoyé sur le champ pendant que je pousse la neige. Il n'y a pas d'indicateur ou de jauge -ce serait trop merveilleux d'avoir ça dans notre corps- sur la quantité d'énergie présente, ni celle dépensée etc.

Il me faut donc être présente à mon corps, et aligner mon esprit sur le fait que je ne peux pas me donner à fond comme je le voudrais. L'expérience m'a apprise que la facture arrive dans les heures et jours suivants ce que j'ai fais ou vécu.

Je trouve ça difficile d'être dans une activité que j'adore, et de devoir contrôler le temps et l'énergie que j'y mets. Parfois, j'arrive à me parler intérieurement, me rappelant doucement que mon corps ne peut pas suivre comme avant. Mon corps mérite que je lui témoigne de la compassion, de la patience, et des soins attentionnés. 

Pour tout vous dire, ce matin avec ma pelle, je me suis quasiment attaché les bras avec de la broche pour ne pas déneiger toute la cour au complet!!

Je me rappelle une ergothérapeute qui m'avait dit ceci: "il faut vous en garder, vous n'êtes pas obligée de donner toute votre énergie". 

Cela m'avait fait réfléchir, alors que je n'avais pourtant pas encore de diagnostic d'EM en main à cette époque. J'étais dérangée car je ne pouvais pas reproduire mes performances physiques d'une fois à l'autre de la routine d'entrainement pour un retour au travail de 2010.  Je comprends maintenant pourquoi je ne pouvais pas avoir des résultats similaires d'une fois à l'autre: mon corps est affecté par l'encéphalomyélite myalgique, il est donc normal de ne pas obtenir les mêmes niveaux de performance physique des jours précédents. Le corps affecté par l'encéphalomyélite myalgique n'arrive pas à refaire son énergie comme les corps de personnes en santé. 

L'épuisement neuro-immunitaire post effort est en quelque sorte la "marque spécifique" de l'EM: un effort physique ou mental peut précipiter la personne dans un épuisement qui dure des jours et des jours, et dans certains cas, pendant des semaines. Par exemple, j'ai lu des témoignages de personnes affectées par l'EM qui ont dépassé leurs limites, et qui ont dû être alité pendant des mois, ayant trop "forcé". Je me reconnais aussi dans cette situation lorsque j'ai tant forcé et forcé encore pour demeurer en emploi. Avec du recul aujourd'hui, je suis certaine que cette résistance ne m'a pas servie, au contraire: l'épuisement était beaucoup trop élevé. En 2012 lorsque j'ai quitté mon travail, j'étais fortement épuisée.

D'aucun pourraient dire: "mais ce n'est pas grave si les personnes affectées par l'EM dépassent leurs limites, ils n'ont qu'à se reposer ensuite". Cette affirmation est vraie pour les personnes en santé, mais voyons voir ce que cela signifie pour les personnes affectées par l'EM. 

Dans le cas des personnes affectées par l'EM, ce dépassement de limites se traduit par des malaises physiques et mentaux des plus troublants et difficiles à vivre. Dans mon cas, voici ce qui se passe lorsque je dépasse mes limites: 

-mon corps "brûle" de douleurs des pieds à la tête
-repos ou sommeil très difficile car le système nerveux semble "étiré: je me sens fébrile comme si j'avais avalé 5 cafés d'affilée.
-j'ai des idées franchement plus sombres voire même parfois suicidaires
-perte d'appétit 
-perte d'intérêt pour mes activités habituelles
-pas de musique, pas de radio, et le moins d'interactions, car ça résonne comme des milliers de décibels dans ma tête.
 

Donc oui, on peut bien se reposer quand on est en épuisement neuro-immunitaire, mais il est long,  difficile et très douloureux d'en revenir. Et souvent, on ne revient pas au niveau précédent.

De plus, il semble que ces épisodes d'épuisement neuro-immunitaires auraient des impacts importants sur les organes et le corps de la personne affectée par l'EM, selon cette étude "Neural consequences of post-exertion malaise in Myalgic Encephalomyelitis/Chronic Fatigue Syndrome:   https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S088915911730051X.

Voici la conclusion des chercheurs: 
 
Overall, this study’s findings emphasize the importance of symptom provocation in the study of ME/CFS by demonstrating significant and characteristically opposite brain and behavioral responses in patients compared to controls – providing evidence that acute exercise can negatively impact neurophysiological processes in ME/CFS. These findings also provide objective evidence for the subjective experience of cognitive symptoms (i.e. brain fog) reported by ME/CFS patients when they attempt to be physically active. Future studies incorporating additional physiological systems (e.g. autonomic, immune, genetic) and alternative fatigue manipulation designs will be necessary to further understand the multifaceted pathophysiology of PEM.

Il est à souhaiter que nous ayons d'autres recherches sur ce sujet spécifique qui permettra aux personnes affectées par l'EM d'être mieux comprises et surtout, d'obtenir une prise en charge médicale qui tienne vraiment compte des besoins spécifiques à l'EM, c'est à dire cesser de pousser sur ces derniers en lien avec la performance physique et l'épuisement neuro-immunitaire post-effort. Car il y a des conséquences importantes pour la personne malade.
 
Je vous souhaite une bonne journée où que vous soyez :) 

 🌻


vendredi 29 décembre 2017

Tout et rien



Aujourd'hui j'ai le goût de sortir un peu de mon petit aquarium, question de vous donner un peu de mes nouvelles.  Suite à mon sac d'espoir pas mal vide, j'ai tourné mon regard vers autre chose. Cette année, je tripe photos d'hiver, car il y a tant de belles images à croquer quand j'arrive à marcher un peu dans mon quartier. J'adore ce magnifique genévrier couvert de neige.

Depuis que je surveille ma fréquence cardiaque -un billet no. 2 sur le sujet bientôt-, je sais maintenant que je dépassais sérieusement mes limites plus souvent qu'à mon tour. J'ai encore du chemin à faire pour améliorer ce suivi mais toujours est-il que je marche moins souvent et moins longtemps, comme de raison. 

Ça ne m'arrange pas, mais c'est comme ça. Deux raisons principales font que les marches à pied sont difficiles maintenant: la bursite trochantérique des deux hanches fait vraiment mal, et de surcroit, ma fréquence cardiaque m'indique que je dépasse mes limites en marchant quelques minutes seulement. Quand mon coeur monte trop haut, je suis en déficit et il m'est difficile de revenir à la maison. Je n'ai alors pas d'autre choix que de forcer pour arriver à bon port. Bref, tout cela pour dire que depuis novembre, je bouge moins qu'avant....et les photos prennent de la valeur à mes yeux. Pour la bursite, j'attends une consultation en physiatrie: il semble qu'on peut m'injecter de la cortisone sous échographie, ce qui s'avèrerait plus précis qu'une injection des hanches au hasard. Dans tous les cas j'ai hâte que ça se règle, car le sommeil est ultra pénible :( 



J'ai déjà dit souvent que j'admirais les jeunes femmes affectées par l'encéphalomyélite myalgique, et qui donnent naissance: je n'imagine pas comment elles peuvent arriver à en prendre soin avec un corps qui s'épuise aussi vite! 

Comme j'avais annoncé à mes filles et gendre que je vivrais les Fêtes chez moi, deux d'entre elles sont venues me rendre visite avec leurs bébés le jour de Noël. Ainsi on a eu la chance de se voir pour environ 3 heures: on a eu le temps de papoter, de partager un repas à la bonne franquette (vive les pâtés à réchauffer!!), de faire manger les purées des bébés (5 et 7 mois), de changer les couches etc. J'ai vite réalisé que je ne peux pas tenir longtemps mes petites filles dans mes bras, car elles pèsent de plus en plus lourd! Ça me désole, mais les muscles de mes bras et de mes mains sont tout faibles et douloureux.  Pas facile d'être une mamie en perte de muscles. J'avoue que ça me dérange. Je ne suis plus la mamie d'il y a dix ans, oh que non: j'avais pas mal plus d'énergie et de force que maintenant. Mes filles sont ensuite reparties avec tout leur attirail de mamans, avec de gros sacs à couches sur les épaules, ouf....Une bien belle visite :)





Ce superbe verre colorée est un cadeau de Noël d'un ami. Je suis reconnue pour boire d'immenses verres d'eau chaque jour d'où le cadeau! Il a été réalisée par l'artisane céramiste Maryse Frappier.  J'adore ses douces couleurs éclatantes, et je me sens vraiment gâtée par un tel cadeau.




Je termine ce petit billet de fin d'année en pensant aux personnes affectées par l'encéphalomyélite myalgique à travers le monde, hommes, femmes, enfants, adolescents. Je pense aussi à ceux qui viennent d'obtenir un diagnostic, un dur moment à vivre.  Tout comme ces petites lumières différentes et alignées, nous sommes peut être liés, tous autant que nous sommes comme personnes affectées par l'EM.

Je souhaite vivement que les recherches avancent plus rapidement afin que des traitements soient enfin découverts pour ralentir voire même éradiquer cette maladie invalidante, et qui impose un lourd fardeau à tous ceux qui doivent vivre avec. Les coûts psychosociaux, médicaux etc, sont énormes et ne sont plus à démontrer...

J'espère que le symposium de mai 2018 sur l'EM à Montréal pourra et saura servir de tremplin pour des résultats probants et fiables. À tout le moins, nous savons que le Dr. Ron Davis sera présent, un chercheur très connu dans le monde de l'EM, et également son fils Whitney gravement atteint.


Je vous souhaite à tous une bonne année 2018. 

Qu'elle soit sous le signe du moment présent, de la sérénité et de l'abondance en tout genre dont vous avez besoin pour bien vivre.


Mwasi   🌻



jeudi 21 décembre 2017

Sac à espoir




 «Avoir la foi, c’est monter la première marche lorsqu’on ne voit pas tout l’escalier» 
– Martin Luther King Jr.



J'ai réalisé que mon sac à espoir est à sec, ces temps-ci.
Je me sens lasse, un peu éteinte. 
Un peu comme si j'ai combattu une armée de dragons. 
Dieu seul sait si le fait de vivre avec l'encéphalomyélite myalgique ne nous donne pas l'énergie pour en combattre de vrais!

Au cours de ma vie, j'ai livré différents combats que je qualifierais d'assez costauds.

Mais depuis quatre ans, je mène un combat face à mon assureur qui persiste à ne pas reconnaitre ses responsabilités à mon égard, une femme malade et invalide. L'an prochain, un juge entendra cette cause. Il est le seul ayant le pouvoir d'obliger cette compagnie à verser ce qu'elle me doit.

J'aimerais vous convaincre que l'encéphalomyélite myalgique est le noeud du problème, et pourtant, ce n'est pas le cas. J'ai entendu d'autres histoires aussi sordides sinon plus encore que la mienne, et le diagnostic n'avait rien à voir avec le fait que l'assureur ne verse pas les prestations d'invalidité pour vivre. Non. Il y a l'histoire de cet homme avec une tumeur au cerveau: l'assureur refusait de payer sous prétexte qu'il simulait sa condition...Je me demande comment on peut simuler une tumeur, surtout avec la technologie médicale avancée que nous avons.

Ce sac à espoir vidé prend une bonne partie de sa source dans cette cause juridique infinie.
Et là ce soir, je suis face à ce sac.
Définitivement plat.
Ce n'est pas la première fois que je vis ce passage à vide: j'en ai vu d'autres.
Ras-le-bol du combat, je suis épuisée. 
On laisse aller..........
Ce n'est pas que je pleure: non, rien ne sort.
Comme si je suis dans une sorte de désert bien sec.

Pour le moment, je ressens un besoin intense de silence, de calme.
Celui de tous les jours.
Je ne sais pas si c'est le tourbillon des Fêtes ou l'effervescence des activités autour de moi, mais je ressens le besoin de vivre ce Noël comme tous les autres jours de l'année.

Tout simplement en suivant mon horaire habituel, et où mon lit est le centre de cet univers minuscule.

L'année 2017 aura été riche en résultats de recherche et d'une plus grande visibilité de l'encéphalomyélite myalgique, que ce soit dans le monde médical ou les réseaux sociaux. Parions que 2018 saura nous apporter d'autres surprises mais surtout, une plus grande visibilité encore, et bien sur, la découverte des causes de cette maladie.


Je profite de cette occasion pour vous souhaiter de joyeuses Fêtes à tous.
Qu'elles soient sous le signe de la paix, de la joie de vivre et de la sérénité.
Et du repos :)




dimanche 17 décembre 2017

Mes indispensables du quotidien.

Lorsque j'étais une jeune étudiante au collégial, les cours de psychologie avaient la cote, et un des professeur aimait beaucoup lancer des mises en situation pour observer nos réactions.

Une d'entre elle consistait à nous imaginer sur une île déserte où on ne pouvait emporter que cinq objets indispensables. Les réponses individuelles étaient originales, parfois farfelues et intéressantes surtout sur ce que cela révélait de la personne. 

Alors que je faisais de l'insomnie hier soir, je repensais à ce vieux souvenir et à mes propres objets indispensables de ma vie actuelle alors que je vis avec l'encéphalomyélite myalgique depuis 2011.

Voici donc mes indispensables en photos que j'utilise sur "mon île" à moi: ils m'aident à mieux vivre au quotidien alors que ma vie consiste maintenant à.... être malade.


Mon premier indispensable :)
Ce n'est probablement pas la première fois que j'en parle, mais ce petit banc pour prendre ma douche est devenu un indispensable. Acheté une poignée de dollars dans un bazar, j'ai tout simplement acheté des nouveaux pieds en caoutchouc bleus en pharmacie. Un bon achat, car surtout que depuis que je surveille ma fréquence cardiaque, le fait d'être assise pour me laver m'aide à faire attention à mon énergie. Les personnes affectées par l'encéphalomyélite myalgique (PAEM) éprouvent de la difficulté avec la station debout: les battements cardiaques s'accélèrent, et parfois, les douleurs aux jambes s'ajoutent en réponse à cette posture difficile à tenir. Souvent, les PAEM ont vraiment l'impression -et parfois c'est vraiment ce qui se produit-, qu'elles vont s'évanouir à force de rester en station debout. Si vous observez une PAEM dans un commerce, il y a bien des chances que ce soit la panier d'épicerie qui tient la PAEM et non l'inverse! Ce banc m'aide car je n'ai pas à supporter le poids de mon corps, et je peux prendre mon temps pour me laver en toute sécurité sans crainte de tomber.





Depuis que je vis avec l'encéphalomyélite myalgique, la météo de mon corps est assez étrange. Dès que je me réveille, mes mains et mes pieds gèlent, et je dois me couvrir de couches d'habits le jour pour arriver à me réchauffer un peu. Le café matinal aide, mais rapidement le froid reprend. 

Avant mes siestes de jour, j'allume ma couverture électrique et je me glisse dans la chaleur des couvertures. Quel bienfait! Ah la la, je fonds comme un fromage et mon corps se réchauffe, puis je m'endors....Pour la nuit, mon corps change carrément de latitude: il n'a plus besoin d'être réchauffé comme tel, et c'est même l'inverse: j'ai  carrément chaud, et le mieux est encore de dormir avec le moins de vêtements possible. Reste que le jour, ma couverture électrique est un indispensable dont je ne passerai vraiment plus. 







Plusieurs personnes affectées par l'encéphalomyélite myalgique éprouvent de la difficulté à lire pour différentes causes: parfois la vue ne s'ajuste pas bien à ce qu'on voit, pour d'autres, c'est un problème de concentration, ou bien les lignes dansent sous leur yeux...

La lecture, c'est une bien grosse partie de ma vie. Je continue à emprunter les livres dans le réseau des bibliothèques de Montréal, et à l'occasion, j'achète des livres usagés. Ceux-ci sont des ouvrages de référence sur les plantes, une passion discrète que j'entretiens depuis quelques temps. Je m'intéresse aussi beaucoup à l'utilisation des huiles essentielles biologiques pour traiter les petits soucis de santé ou tout simplement pour apprécier leurs arômes et les bienfaits associés. J'ai la chance de pouvoir encore lire quoique je sais bien que je lis moins abondamment et moins vite qu'auparavant. Reste que la lecture est encore et toujours indispensable à ma vie avec les longues heures de silence et de calme à meubler quand je suis à la maison.



Les plantes sont aussi un grand indispensable dans ma vie de recluse: elles agrémentent le quotidien, et on peut suivre leur progression au fil du temps. C'est de la vie en pot! J'aime voir les nouvelles feuilles sortir de terre et ça ajoute une touche de vie dans ma chambre. Comme mon espace est limitée, j'ai dû faire des choix mais il en reste suffisamment pour que ma fibre jardinière quatre-saisons soit rassasiée. Ce qui importe, c'est que je puisse avoir à portée de main cette indispensable vie végétale qui ne demande qu'à pousser encore et toujours...C'est ma petite thérapie végétale personnalisée!





D'autres petits indispensables à ma vie: j'adore faire des mots cachés et dessiner de temps à autre. Mine de rien, j'arrive à me concentrer s'il n'y a pas de bruit environnant. Mes dessins sont loin d'être parfaits! Je dessine tout ce qui me passe par la tête: des visages, des bonhommes tout croches, des objets, des situations aussi parfois. Je n'ai pas de don spécial pour le dessin mais je m'en fiche complètement: le but, c'est de me distraire, de m'amuser et non pas de faire dans la perfection ou la performance. Une sorte de retour en enfance pour ma part, car j'aimais dessiner il y a de cela très longtemps. 

L'an dernier, je tricotais beaucoup mais cette année, ma situation matérielle réduite fait que je n'ai pas sorti crochet et aiguilles cette année. Mon matériel est empaqueté et rangé quelque part, ça devra attendre que je sois installée dans mon propre logement. 

Et vous, quels sont vos indispensables dans la vie de tous les jours, et qui font une différence dans votre vie?  Si vous le souhaitez, vous pouvez m'écrire à: mwasikitoko07@gmail.com ou sur ma page Facebook Mwasi Kitoko. 

Au plaisir de lire vos réactions! Je suis curieuse de savoir quels sont vos indispensables qui vous aident à vivre.





lundi 11 décembre 2017

"De la vue sur les Champs Élysées aux ruelles de Montréal", un témoignage d'Ariane.




De la vue sur les Champs Élysées aux ruelles de Montréal

Si vous regardez bien à travers la foule des touristes, vous devriez l’apercevoir. Elle marche le nez droit, d’un pas assuré et rapide sur ses talons de 10 centimètres. Elle a l’air sûr d’elle, avec sa mallette à la main. Une « business girl », c’est certain. De plus près, on peut voir son maquillage discret et naturel, ses bijoux de qualité, sa coupe qui ne doit pas être bon marché, et son tailleur jupe impeccable.

De toute façon, elle est la seule à cette heure de la journée à tourner le dos au monument des Champs Élysées. Elle fonce vers une entrée discrète à côté de la porte d’un restaurant étoilé. 
Je m’appelle Ariane et j’ai 33 ans. Je travaille dans la finance auprès des particuliers. Un genre de gestionnaire de fortunes privées, en quelque sorte, et dans mon métier l’habit fait le moine alors j’évite les fausses notes. Tailleurs achetés directement en Italie, chaussures à talons exclusivement, je ne sors jamais sans m’être douchée, parfumée, maquillée, bijoutée, coiffée etc, et ceci 6 jours par semaine. 

Le succès, le vrai. Une métro-sexuelle, célibataire, dévouée à sa carrière dans toute sa splendeur, et sans états d’âmes. Je l’ai bien mérité après mes longues années d’études. À moi les bons restaurants, les bons quartiers de Paris, les bons collègues, les bons vins, les bonnes sorties et le champagne qui coule à flot.

Mais depuis quelques temps mon visage accuse la fatigue. Mes grasses matinées du dimanche ne me suffisent plus. J’avais l’habitude de compter les soirs où je rentre chez moi mais depuis quelques mois, je voudrais rentrer plus souvent. Mon canapé me semble appelant alors que je m’en fichais éperdument avant. Je me transforme en princesse aux petits pois. Il y a toujours un truc qui me dérange la nuit et je « pitourne » dans mon lit sans comprendre.

Je m’appelle Ariane et j’ai 35 ans. Je suis officiellement fibromyalgique, et je me gave de médocs. Je me sens soulagée parce que dans le fond, je ne croyais pas vraiment à la théorie du burn out. Pas moi. Pas en plein essor. Impossible d’arrêter un train à pleine vitesse. Je veux bien prendre mes anti douleurs mais mon travail, c’est ma vie. Regardez par vous-même : je n’ai même pas une paire de jeans dans ma garde-robe tellement je ne sais pas ce que veut dire un jour de repos. Mon frigo me renvoie de l’écho et je me demande même si le pressing ne prendrait pas mes culottes en plus du reste de mon linge pour m’éviter d’avoir à lancer une lessive.

Je m’appelle Ariane et j’ai 38 ans. Je prends l’avion dans 2 jours. Ma sœur a acceptée de m’héberger chez elle car je ne sais plus vers qui me tourner. Je dors 18 heures par jour et je n’arrive plus à changer les draps de mon lit sans m’effondrer direct dedans, d’épuisement. J’ai dû avouer à mon associé que je suis au bord du suicide et que je dois arrêter de travailler. Je lui donnerai toutes mes parts de l’entreprise pour qu’elle survive à mon départ. Je m’excuse sans pouvoir cesser de la laisser tomber aussi brusquement mais je n’en pouvais plus de mentir. Les faux rendez-vous à l’extérieur pour rentrer chez moi dormir 2 heures, les erreurs sur les dossiers clients, la compta qui part à l’envers, et moi qui recalcule 4 fois avec toujours un autre résultat. J’ai laissé tomber mes amis pour réussir à travailler. Maintenant, je dois laisser tomber le travail pour réussir à survivre. J’ai bien essayé de demander de l’aide aux parents, mais le déni s’est installé. Il ne peut pas y avoir une personne handicapée dans la famille !! Impossible. Chez nous, on se lève pour guérir et l’énergie vient en travaillant. Et puis l’encéphalomyélite myalgique n’est pas vraiment une maladie. Rien qu’un bon psychiatre des beaux quartiers ne pourrait soigner ! Mais je n’ai plus le temps de négocier le soutien de mes proches. Mes finances sont à 0, et si je reste dans mon super logement de cadre supérieur, je vais droit à la rue. Pas de sécu (aide sociale) pour moi qui ai choisi d’être travailleuse autonome. 

Comme je n’ai pas de bras pour faire mes cartons, ma sœur vient me récupérer chez moi pour m’emmener à Montréal. Je ne serais plus une grande fille indépendante.

Je m’appelle Ariane et j’ai 40 ans. Je ne peux plus prendre ma douche tous les jours. Je dors 12 heures par nuit, et j’en passe au moins 15 au lit. Je ne vais nulle part où il faut marcher plus de 10 minutes, je ne sors plus jamais s’il y a de la musique, des cris d’enfants, de la lumière trop vive, trop de personnes en même temps, trop de sollicitations, trop de vie quoi…

Je porte des talons plats et des tenues sport confortables et élastiques à cause de mon bedon qui me fait souffrir. Je ne porte plus de maquillage parce que je transpire à toutes les saisons dès que je fais le moindre effort, alors à quoi bon ? J’ai revendu mes plus beaux bijoux pour payer les frais de réparation de ma voiture et conserver le peu d’indépendance qu’il me reste. Je n’ai jamais retravaillée et je reste 80% du temps encabanée. 

Je suis chanceuse. Je fais partie des 20% de ceux qui peuvent fonctionner !!


Ariane

mardi 5 décembre 2017

"L'EM et moi", un témoignage de Julie.



Tous les parcours, chemins et sentiers menant au diagnostic d'encéphalomyélite myalgique (EM) sont uniques à chaque personne dans le monde. Voici le témoignage de Julie. 

  
L'EM et moi

Je suis une femme de 34 ans, conjointe et mère de 3 enfants. 

De nature travaillante, fonceuse et active, j'exerce un métier dans le domaine de la petite enfance depuis une dizaine d'années. J'adore la course à pieds, le jardinage, la cuisine et assister de près aux sports pratiqués par mes enfants. 

Voici donc ce à quoi ressemblait ma vie avant le 10 mai 2016... une date bien ancrée dans ma mémoire!

C'est le début d'un arrêt de travail, d'une multitude de symptômes, de rendez-vous, de tests médicaux, de questionnements, mais surtout le commencement d'une nouvelle vie... 

Mon principal symptôme : une fatigue, énorme...difficile à quantifier, à expliquer. Le terme : "épuisement" serait beaucoup plus approprié. À cela s'ajoute une faiblesse intense des jambes, surtout au niveau des cuisses, où la douleur est tel une sensation de brûlure musculaire. Les vertiges, les problèmes de concentration, les frissons, les troubles du sommeil et digestifs, s'ajoutent au fur et à mesure que les semaines avancent. Au fil des mois, l'exclusion de plusieurs maladies se confirme et le diagnostic de l'EM s'est concrétisé en juin dernier.

Ma vie a donc drastiquement changée, tout comme celle de mes proches. Je me retrouve dépendante et en perte d'autonomie. Mon moral en prend un coup, je n'accepte pas du tout ce qui m'est imposé.

On dit que l'entourage fait une différence dans la "qualité de vie" de la personne atteinte, et pour ma part, j'ai cette chance. Mon conjoint, ma famille et les amis sont au rendez-vous, tous à leur façon.

Comment ACCEPTER ma nouvelle réalité ? Comment gérer la culpabilité que je ressens face à mes enfants et mon conjoint ? Comment gérer la colère et la tristesse qui m'envahit ?
J'ai choisi de consulter une psychologue.
  
L'ACCEPTATION... un grand mot, étalé sur un long chemin, qui nous appartient. Malgré le support immédiat, il y a des étapes à traverser et pour ma part, elles ne sont pas "linéaires". J'avance, je fais du sur-place, je recule... mais je garde en tête que j'avancerai encore à un moment donné.  Plusieurs deuils sont à faire... de la personne que j'étais, du travail, du sport et de mon indépendance.

La dépression
Je m'y suis mise les pieds pendant un certain moment... j'ai ressenti une grande détresse m'envahir, un intense mal à l'âme... où l'on ne sait plus comment gérer ce que nous vivons...
À une certaine étape, je réalise que je peux avoir un contrôle, du pouvoir sur mon humeur, contrairement à mon état physique.


Ma gestion de l'énergie
  
-Prioriser où ma précieuse énergie sera utilisée.
-Cibler ce qui est le plus énergivore : la position debout, la marche, les longues conversations en personne ou au téléphone, être dans un endroit public où les bruits, les mouvements et l'éclairage deviennent difficile à gérer.
-J'utilise un fauteuil de transport pour mes déplacements à l'extérieur de la maison. Si par malheur, je sortais pour une courte période, c'était le "crash" assuré. Ainsi, cela a eu un gros impact positif sur mon moral.
-Les bouchons d'oreille pour réduire le bruit me suivent dorénavant dans mon sac à main.
-De l'aide pour les tâches ménagères et quelques repas font maintenant partis du budget.
-Lorsque je peux cuisiner, je répartis la tâche en plusieurs étapes. J'ai dorénavant une chaise sur roulettes dans ma cuisine. Pratique pour se déplacer d'une station à l'autre.
-Faire un horaire de planification non-surchargé pour les rdv et les sorties. Éviter le stress et les émotions fortes, bonnes ou mauvaises.

En gros, je me donne le droit d'être heureuse. Je me permets de faire quotidiennement quelque chose qui me donne le sourire et qui me permet d'être dans le moment présent.
Régulièrement, à la fin de ma journée, je pense ou j'écris ce que j'ai eu de positif, aussi petit ou banal pour autrui... je le fais pour me détacher de la maladie, pour comprendre ce que je suis entièrement, autre qu'une personne atteinte de l'EM/Scf...
La maladie m'amène à prendre conscience de ma vie et des valeurs de base que j'avais d'ancrées en moi, et que par le rythme effréné... on oublie... parfois... J'en suis donc aujourd'hui, à me redéfinir en tant que personne, à garder espoir... Je dois m'écouter et me respecter... 

À vous tous et toutes, je vous souhaite douceur et chaleur, 

Julie
Terrebonne, Québec


dimanche 3 décembre 2017

Dans mon aquarium




Quand je pense à ma vie avant l'arrivée de l'encéphalomyélite myalgique, j'ai l'impression d'avoir vécu dans un immense aquarium où l'action et les rebondissements ne manquaient jamais, et s'il en manquait, j'étais la première à en créer! 

Ma vie de grand poisson parmi les autres bancs de poisson, de requins, d'oursins etc, allait bon train, et je prenais ma place. J'avais une vie remplie de défis personnels et professionnels qui me tenaient en haleine. J'aimais aller toujours plus loin.

Après le diagnostic d'EM, ma vie dans le grand aquarium s'est peu à peu muée en une vie dans un aquarium pas mal plus petit, et aussi plus protégé qu'avant.  Maintenant, je dirais que le fait d'avoir quitté le grand aquarium est somme toute exactement ce dont j'avais besoin pour vivre désormais un nouveau format de vie que je qualifierais de sérieusement rapetissé. Fini le plan de carrière, fini les relations avec l'équipe de collègues, fini le fonctionnement "turbine" que j'aimais tant....À peu près tout est tombé, parti.

Vivre avec l'encéphalomyélite myalgique est très déstabilisant, car ces pertes nombreuses d'une vie sociale et professionnelle épanouie nous tombent dessus, et s'ajoutent à un lourd fardeau de symptômes physiques et mentaux qu'on peine à comprendre et à assimiler au fur et à mesure où on comprends avec quelle maladie on vit. C'est lourd, très lourd à vivre et à porter. Et lorsqu'on comprend qu'il n'y a rien pour nous guérir, la lourdeur ajoute une couche supplémentaire.

Bref, plus le choix, j'ai dû malgré moi transférer d'aquarium :( 

Dans mon petit aquarium actuel, qui pourrait se définir comme étant un hybride entre ma vie rapetissée socialement et physiquement, les activités extérieures sont peu nombreuses: elles se limitent à des rendez-vous médicaux, rencontres du groupe d'entraide, faire les courses pour me ravitailler en bouffe,  médocs et lecture.  Ma vie sociale a beaucoup diminuée, et le fait que la maladie évolue y est probablement liée: exit les petits cafés au centre-ville pour voir une ex-collègue, je n'ai plus la force de faire cela. À la fois, je dois être honnête et avouer que ça ne me manque pas trop quand même. 

Le fait de vivre dans mon aquarium "adapté" à mes nouvelles réalités m'a fait réaliser bien des choses. Entre autre, que les discussions avec les autres sont bien plaisantes, mais je me rends aussi compte que des éléments viennent brouiller ce plaisir. 

Sur le plan cognitif d'abord, je ressens de plus en plus de difficulté à suivre les conversations ou lorsqu'une personne s'adresse à moi. Ça ressemble un peu à ceci:


Amie: Ah tu sais qu'un tel est *****************************et l'autre jour, puis cette femme racontait que ************************!!!

Moi: hein??? !!!  😧


J'éprouve de plus en plus de difficulté à capter ce qu'on me dit parfois,  et tout dépendant de la situation, je préfère parfois laisser aller. Il y a des situations où il est mieux de demander de reprendre. Par exemple, lorsque j'appelle différentes administrations publiques et que les employés parlent trop vite,  je n'hésite pas à leur dire d'emblée "faites comme si vous parlez à une personne de 80 ans". Et ça marche: les gens ralentissent le débit et s'assurent que j'ai bien compris ensuite. Là où ça corse, c'est quand j'écoute une personne affectée par l'EM comme moi qui parle vite! Il me faut le dire, mais bizarrement, je suis hésitante, comme si on allait me juger....

Comme vous le savez déjà, j'ai troqué un grand appartement en mai dernier pour une chambre louée chez un ami: peut être que le concept d'aquarium n'est pas étranger à l'espace réduit dans lequel je vis maintenant. Toujours est-il que malgré le fait que je vive un peu coincée, je pense tout de même que le fait de vivre en chambre est probablement une phase de transition dont je bénéficie, le temps que ma cause en cour soit entendue en 2018. Petit espace, petite vie, et c'est correct comme ça :) Je n'ai plus les moyens physiques et sociaux de mon ancienne vie où le travail prenait presque tout l'espace, avec une vie de famille plus large.

Aquarium protégé aussi en quelque sorte: je m'y sens en sécurité, bien entouré avec les deux colocs, souvent prêts à me rendre des services tels que déplacer des boites, soulever des choses lourdes, m'emmener faire une course. Mine de rien, ça m'aide beaucoup et ça leur donne l'occasion de me donner un coup de main.

Un autre élément important dans la vie de mon aquarium, est le fait que je peux contrôler la plupart des paramètres qui font que j'aime ma vie: si je ne veux voir personne, alors ce sera comme ça, je reste tranquille. Si j'ai le goût de jaser avec mes colocs c'est bon, et si le goût n'y est pas alors je reste dans ma chambre et je fais mes affaires à mon rythme. Mes contacts avec l'extérieur sont limités, et ça aussi j'apprends de cela. Je me rends compte aussi que je vis passablement d'anxiété, juste à penser que je doive me rendre à un rendez-vous ou voir quelqu"un: ça monte comme une vague que j'essaie de contrôler, et j'avoue que ce n'est pas toujours facile.

Est-ce de l'"anxiété sociale"? Probablement. Il semble que les personnes affectées par l'encéphalomyélite myalgique en soient souvent victimes. Ce qui ne m'aide pas associé à tout cela, est le fait que les bruits, les nombreux mouvements des gens et véhicules augmentent rapidement mes battements cardiaques, créant aussi une sorte de panique dans mon corps: probablement une réaction "fight or flight" du cerveau. Et bien entendu, ces situations me vide de toute énergie: il est alors temps de retourner à mon aquarium...

Aujourd'hui, ma vie en petit aquarium m'apparait comme un milieu en quelque sorte salutaire pour mon état de santé. Je peux mieux gérer le stress et les interactions, éléments énergivores par excellence pour des personnes qui s'épuisent trop vite et facilement comme nous. Une vie plus petite, plus calme en milieu protégé où je gère les interactions comme je le veux est ce dont j'ai besoin présentement, pour arriver à vivre au quotidien avec l'EM.  Et quand il me prend l'envie d'aventure quand l'énergie est un peu au rendez-vous, alors je sors ma petite valise, et j'arrive parfois à rendre visite à des membres de ma famille ou mon amie à Québec.

Cela m'a pris du temps, mais j'ai appris à apprécier où je vis actuellement. Il est vrai que je suis un peu coincée et qu'un appartement plus grand serait appréciable, mais pour le moment j'accepte que ma situation financière ne me permet pas de le faire. Je croise les doigts et je rêve parfois d'une vie dans un autre genre d'aquarium un peu plus grand....

🌻



N.B.  J'éprouve des difficultés avec certaines fonctionnalités de mon blogue, j'avoue que mes capacités cognitives ont déjà été meilleures.  Je vous remercie pour votre compréhension :) Pour ceux qui souhaite m'écrire, vous pouvez le faire à: mwasikitoko07@gmail.com ou me retrouver sur ma page Facebook.