dimanche 31 juillet 2022

Vivre avec un déambulateur: la suite.

 


En mars dernier, je publiais un billet sur l’achat de mon déambulateur. Voici la suite et où j'en suis avec mon expérience. 

Petit rappel: j'utilise une canne depuis quelques années pour me déplacer. Depuis la fin de 2021, je ressens de plus en plus de difficulté à rester debout sans bouger. Aussi, je suis en perte de vitesse avec l'énergie également d'où le choix du déambulateur pour m'aider. Ça reste à être confirmé avec mon neurologue bientôt, mais je soupçonne faire de l'hypotension orthostatique.

Tout doucement, je m'adapte à l'utilisation de mon déambulateur. Pour être honnête, j'avoue avoir sous-estimé le temps d’adaptation physique et émotionnel que cela demande de se promener avec, et de se sentir vraiment à l'aise. 
 
Tout d’abord, j’ai commencé par l’utiliser un jour ou deux semaine, en alternance avec la canne. Depuis, j'ai augmenté son utilisation pratiquement à chaque jour.  Mais avant d’être vraiment confortable, je me suis rendue compte que je poussais mon déambulateur comme si c’était une poussette. Je le tenais à bout de bras, forçant ainsi beaucoup trop mon corps, comme si j'avais encore ce réflexe de pousser un enfant. Bien entendu, j’étais plus fatiguée à cause de la posture étrange  adoptée sans vraiment m’en rendre compte. Une fois que j’en ai pris conscience, je marche en rapprochant plutôt le déambulateur vers moi, et non l'inverse. Depuis, ça va nettement mieux ainsi. 
 
La joie de se promener en déambulateur, c’est comment dire? 
 
...c’est le plaisir de tenir les deux poignées, de pouvoir lever les yeux et de regarder attentivement tout autour de moi, sans surveiller constamment le trottoir pour savoir où je mets les pieds, et surtout, sans crainte de tomber. C'est aussi moins demandant en énergie, car je marche droit et non pas en zigzag ou en crabe. 
 
...c’est aussi le plaisir de marcher encore, à mon rythme, et de m’asseoir quand j’en ai besoin. Que ce soit au niveau du trottoir ou ailleurs, j'applique les freins et je m’assois. Avec une canne, je cherchais constamment où se trouvaient les bancs publics pour m’y asseoir et prendre une pause. Avec le déambulateur, la recherche de bancs terminée!
 
...c’est aussi le bonheur de ne plus faire la file debout, ce qui est passablement difficile quand on vit avec l'encéphalomyélite myalgique. Hier par exemple, j’attendais qu’un commis d’épicerie renfloue le comptoir de viandes en rabais. Je me suis assise sur mon déambulateur pendant vingt minutes, au frais, sans soucis. Que demander de mieux? Attendre assise: une grosse économie d’énergie à mon actif.
 
Un autre bonheur que je reproduis à souhait : je roule jusqu’au petit parc près de chez moi. Avec un livre, ma bouteille d’eau, des fruits, le vent dans mes cheveux, il y a tout plein d'écureuils et d'oiseaux autour de moi. J’admire le tout en prenant de bonnes respirations : c’est le moment d’être entièrement présente et de savourer. Pas si mal la vie, finalement, avec ce déambulateur...
 
Pour le moment, je n’ai pas encore essayé la deuxième fonction du déambulateur, soit la transformation en fauteuil roulant. Mais d’ici l’automne, je compte bien l’essayer. Encore faut-il que quelqu’un me pousse!
 
Je ne peux ignorer que se mouvoir en déambulateur comporte des défis. Comme nous le savons, bien des commerces n’ont pas de portes automatiques, et je me retourne pour pousser la porte avec les fesses! Pas pratique du tout. Parfois, une âme charitable ouvre la porte pour moi, mais je ne peux pas toujours compter là-dessus.
 
L’autre hic, c'est l'absence de rampe d’accès à plusieurs endroits. Les escaliers sont un défi auquel je ne peux pas m'attaquer pour le moment.  Je n’ai pas encore tenté non plus les transports en commun avec mon déambulateur, un défi passablement plus élevé. On sait par exemple, que le métro de Montréal comporte bien peu d'ascenseurs pour les personnes à mobilité réduite. Aucune idée si je tenterai un jour l'expérience ou pas, mais je ne suis pas très tentée pour le moment, à vrai dire.
 
Une petite anecdote. Alors que je roulais avec mon engin, j’ai croisé une maman avec sa fille dans sa poussette. La petite s’est mise à dire : « regarde maman, une poussette ». La maman et moi avons bien ri. J’ai expliqué à la petite que c’est une sorte de poussette pour les grand-mamans. 
 
En terminant, j’ai songé qu’il y a à peine quelques années, je marchais mes nombreux kilomètres par semaine pour me rendre au travail. J'étais en santé, et rien n'aurait pu me convaincre du contraire.  

Je suis bien loin de cette époque.La différence cette fois, c'est que cette pensée ne m'a pas pincé le coeur comme il y a quelques temps. Je suis plutôt restée avec un léger sourire et un sentiment de sérénité. 

Après tout, j'ai marché et vécu ces kilomètres dans une toute autre vie...

🌻
 
 

lundi 4 juillet 2022

Ô Nature



"Va prendre tes leçons dans la nature." -Léonard de Vinci


J'ai la chance de vivre dans un quartier et un environnement relativement vert. Mes voisins verdissent et fleurissent également, ce qui rajoute à mon bonheur. Au fil des jours, je croque les photos de ces fleurs croisées au hasard de mes petites balades. Certains parterres sont remplis de fleurs, d'herbes et d'insectes divers qui bourdonnent: c'est rempli de vie, de couleurs et de mouvements. Je ne me lasse pas de prendre des images de ces beautés qui me ravissent, pratiquement au pied de ma porte ou pas très loin. 

Une des leçon de la nature à laquelle je pense, c'est que rien ne dure. Tout passe, que j'y pense ou pas. La preuve, ces étonnantes beautés colorées étaient enfouies sous le neige, il y a si peu de temps. Qui aurait pu soupçonner leur présence et leur étonnante évolution ensuite? Et pourtant, elles partiront comme elles sont venues. 

Même leçon pour les insectes. Une vie enfouie, une vie au soleil et hop, elles disparaitront. Pourtant, ça grouille, ça pullule et sous peu, la fin. Tout ce grouillement est intense et ne se pose certes pas de question sur la météo, le taux de change etc. Non, ça vit dans le moment présent. Point. Alors, autant profiter amplement de toutes ces belles créations et créatures de la saison estivale. 

Et vous, quelle-s leçon-s en tirez-vous?

J'espère que ces images vous inspireront autant qu'elles le font pour moi. Je vous souhaite un bel été en douceur et en couleurs. 










Pois mange-tout semés dans des boites à fleurs, sur la rue. 







Le tilleul du voisin, juste au-dessus de ma petite cour.
Une odeur merveilleuse et sucrée s'en dégage.






mardi 28 juin 2022

"Renoncer", par Hélène F.




RENONCER pour éviter absolument le malaise Post-Effort. Comprendre le mécanisme de ma maladie, l'encéphalomyélite myalgique. Accepter une vie lisse, tranquille, sans plus sortir de chez moi. 

Ne rester présente que pour mon entourage immédiat. 

Oublier la vie sociale à l'extérieur. Organiser mon intérieur. J'ai beaucoup d'aides, ouf. 

RENONCER pour faire du repos forcé. S'allonger pour des pauses de plus en plus longues entre de si faibles activités. Différer tout à nettement plus tard. Accepter de dîner avec mes enfants, allongée sur le canapé. Modifier mes priorités. 

RENONCER ENCORE PLUS malgré le pacing déjà omniprésent depuis des mois. Limiter aussi les efforts de concentration, les émotions. Tenter de stopper cette lente et irrémédiable aggravation. 

PLONGER vers toujours plus de dépendance. Être totalement alitée des semaines entières. Se sentir digne et belle malgré les toilettes faites au lit. Ma tête engluée est là, mais mon corps m'échappe. 

RENONCER pour ne pas glisser encore. Je coule vers l'état très sévère. Ne plus tenir assise longtemps. Je ne suis bien que allongée au calme. Ma tête me fait si mal. 

RENONCER TOUJOURS PLUS pour ne pas m'aggraver. Mes amis rentrent désormais directement chez moi. Ils s'assoient près de mon lit, m'aident, ne restent pas longtemps pour me préserver. Oubliés les goûters dans mon jardin! 

RENONCER. 

Et pourtant, je coule. 
J'ai peur. 
JE NE VEUX PAS PLONGER. 



Hélène F.
Massy, France 


jeudi 23 juin 2022

"Cette maladie m'a tout pris": le témoignage de Nathalie



Cette maladie m’a tout pris


Tout ce que j’avais bâti, tout s’est envolé. 
J’avais une vie. J’avais des projets.
Avant que je ne tombe malade, j’étais une femme qui aimait vivre. 

J’aimais le mouvement. J’adorais danser, crapahuter dans les montagnes, voyager, jouer avec mes enfants. Mais aujourd’hui, tout ça, c’est du passé. 

En 2019, je suis tombée malade. 

Tout ce qui raisonnait en moi, tout ce qui me faisait vibrer, tout allait être brisé.
J’allais être terrassée par la fatigue avec en prime, de nombreux symptômes qui s’y ajoutaient. 

Tout devenait difficile. 

S’occuper de mes 2 enfants devenait un exploit de chaque jour. 
Psychomotricienne, je perdais mon cabinet libéral. 
Tous les actes de la vie quotidienne m’étaient quasi impossibles. 
Ma vie est à l’arrêt. 

À cause de cette fatigue inexpliquée, j’ai consulté d’innombrables spécialistes. 
Tous mes résultats médicaux étaient normaux. 
De ce fait, les médecins préconisaient une réadaptation à l’effort. 
En mode combattante, je commençais cette rééducation. 
Je voulais guérir et reprendre le cours de ma vie. 
Du coup, le mot fatigue n'existait plus. 
Je n'avais plus de force, plus d'énergie. 
Je suis restée plus de 10 mois dans ma chambre, dans la pénombre et le silence. 

Pendant tout ce temps, aucun soin ne m’a été apporté. 
Je ne pouvais même plus me lever. Je ne pouvais pas me déplacer. 
Incapable de bouger. Le moindre geste était un défi. 
Tellement léthargique, pas même la force d’aller voir un médecin. 
Seule face à ce qui m’arrivait. 

Il a fallu 3 ans pour que le diagnostic tombe.
Je souffrais d’encéphalomyélite myalgique. 
Depuis ce jour, je survis. 
Cette maladie m’a enfermée, isolée.  
Je ne sors plus. Je reste chez moi depuis maintenant trop longtemps. 
Lorsque j’essaye de faire quelque chose, cela se finit toujours par un malaise post-effort. 

Cette maladie est invisible aux yeux des autres et de la société. 
Personne ne peut se rendre compte de ce que l’on vit. 
Le mot fatigue est loin d’être approprié. 
Il est inconcevable d’imaginer les malaises qui nous envahissent et nous clouent littéralement au lit. 

Les malaises post-effort font partie intégrante de ma vie.
Comment vivre, sans rien pouvoir faire ? Mission très difficile.

J’ai espoir que la recherche avance.
Il ne me reste plus que cette option. Il faut qu’une solution soit trouvée. 
Je vis entre mes 4 murs avec cet espoir.

Une maladie multisystémique, débilitante et toujours pas reconnue en France. 
Victime de trop de psychologisation et de négligence. 
Il faut que tout cela cesse...



Nathalie, France
 

lundi 13 juin 2022

Un été de lenteur

"Je vais élever des escargots, leur lenteur m'apaise" -Patrick Gauvin


L'été sera sous le signe de la lenteur. C'est le rythme dont j'ai besoin pour vivre avec l'encéphalomyélite myalgique. La lenteur prend de l'ampleur depuis quelques mois: me déplacer, penser, rassembler mes idées, cuisiner etc. Même revenir d'un malaise post-effort est plus lent. 

Bienvenue lenteur

J'observe de près mes boîtes à fleurs, mon petit jardin. 
Ma routine quotidienne, encore et toujours, se révèle être une alliée précieuse pour conserver l'énergie. 
Je savoure même de ne rien faire...
Oui, ne rien faire
Je regarde les molécules d’oxygène circuler
J’apprécie le calme, le silence, la lenteur

Je me parle avec plus de douceur
Je me conseille même parfois à voix haute
Ne suis-je pas la personne la mieux placée pour comprendre ce dont j'ai besoin pour mon bien-être?  

Je ne sais pas si c’est l’âge ou si le fait de vivre avec l’encéphalomyélite myalgique me fait vieillir prématurément, mais j’ai l’impression de vivre dans un univers où tout ou presque est « trop ».  Trop de rendez-vous médicaux, de suivis, de consignes. Trop d’actualités difficiles à suivre etc.

Trop de trop 

Récemment, j'ai subi une IRM d'une trentaine de minutes. Ce qui m'a frappée, c'est combien je me fatigue plus vite quand je suis hors de chez moi. Me retrouver dans un hôpital ou une clinique pour un test est extrêmement énergivore. Les bruits environnants élevés de ces lieux, les consignes rapides des employés (on fait répéter), les discussions avec les clients, la manière rapide et parfois un peu brusque d'agir du personnel, tout cela me laisse sur le carreau comme si je sortais d'une tornade. Et c'est sans compter ce que représente passer un IRM: sons et lumières décuplées, stress, douleurs pendant l'examen etc.

Même si ces tests et examens sont nécessaires, j'en ressors si épuisée que je les sens comme des agressions sur mon corps. Je ne me plains pas de recevoir des services de santé, loin de là, je suis même privilégiée. Mais les impacts de ces sorties médicales ont un poids que je ne peux en aucun cas ignorer. J'ai beau me dire que j'ai de la chance d'être bien suivie,  ces rendez-vous demeurent difficiles à vivre et à "survivre" quand on vit avec l'encéphalomyélite myalgique. 

Immanquablement, le malaise post-effort s'ensuit. Et je ne suis pas en mesure de dire combien de temps sera nécessaire pour que mon corps revienne à un état "normal". 




Après ces incursions médicales, je retrouve mon petit cocon de calme et de silence avec bonheur. J'ai réussi, avec de l'aide, à aménager ma petite cour. J'alterne alors lit-divan-cour quand je suis capable. 

C'est mon lieu privé où je me régénère. La cour a beau être petite, on y trouve plantes et fines herbes. Au-dessus de ma tête, l’immense tilleul du voisin, planté trente ans plus tôt, étend ses branches chargées de fleurs. Je vis dans un petit écrin de verdure. Je savoure cette chance inouïe qui m’est donnée. Énergie faible? Je m'oxygène dans mon royaume, ne serait-ce que quelques minutes. 




Cet été de lenteur me fait aussi vivre une certaine forme de gratitude, de reconnaissance en quelque sorte. 

Ma vie est loin d'être parfaite, mais je l'aime.  J'ai la chance de pouvoir encore écrire et lire à mon propre rythme dans un bel environnement qui convient à mon état de santé. Si j'ai un problème urgent, j'ai des  personnes autour de moi qui peuvent réagir rapidement pour me venir en aide. J'ai des amis, j'ai de la famille qui m'entoure, c'est une chance inouïe. Pour tout cela et même plus, je dis merci. 

Je vous souhaite de savourer votre été où que vous soyez. Pour les personnes affectées par l'encéphalomyélite myalgique, j'espère de tout coeur que la saison estivale vous offrira un peu de répit et que vous pourrez refaire un peu vos forces

Un bel été à tous

🌻

 
 

mercredi 1 juin 2022

Le témoignage de Laëtitia: "Mes envies sont simples. Mais irréalisables".




Je m’en souviens comme si c’était hier. Je venais d’avoir 43 ans. 

Ce vendredi 2019, vers 16 :15, j’ai fait un malaise sur mon lieu de travail, dans ma classe. C’était une grippe sévère. Mon corps m’a lâché et ma vie a basculé. 

Je pensais que cette grippe passerait au bout de quelques semaines. Malheureusement, il n’en a rien été. Pire, mon état s’est dégradé au fil des mois. Après une année d’errance médicale, je suis enfin diagnostiquée en 2020 : je suis atteinte d’encéphalomyélite myalgique (EM) au stade sévère. 
 
Depuis 3 ans d’EM, j’ai plein d’envies, mais je ne peux les réaliser. 3 ans en position horizontale face à mon plafond, c’est long. 

Ce sont des envies très simples : 
 
Je voudrais réussir à rester assise 15 minutes sans me trouver mal et être obligée de m’allonger.
 
Je voudrais aller dans mon jardin voir les fleurs. Je ne suis pas allée dans mon jardin depuis 3 ans. Je suis coincée à l’étage de ma maison depuis 2 ans. 
 
Je ne peux plus monter d’escalier. J’aimerais tenir une conversation au téléphone en étant certaine de ne pas déclencher un malaise post-effort qui durera 24 à 48 heures. 
 
J’aimerais pouvoir lire un roman, c’est impossible avec mes difficultés de concentration et ma vision floue. 
 
J’aimerais partager des activités avec mon fils, jouer, discuter avec lui, sans avoir un mal de tête au bout de 5 à 10 minutes. 
 
J’aimerais pouvoir faire plus de 20 pas d’affilée sans être obligée de m’effondrer sur une chaise ou par terre. 
 
J’aimerais pouvoir couper ma viande toute seule et manger sans faire tomber ma fourchette. 

J’aimerais me lancer dans le dessin et la peinture, écrire ce que je vis ou de jolies choses comme des poèmes, mais je n’arrive pas à rester assise. 

J’aimerais pouvoir supporter les sons de mon entourage et les bruits de dehors. J’ai développé une intolérance aux sons qui est incroyable, et qui m’oblige à porter un casque antibruit. 
 
J’aimerais reprendre mon métier de professeur des écoles que j’aimais tant. C’est impossible. Dépendre financièrement de mon conjoint : c’est difficile à accepter. 
 
J’aimerais revoir ma famille et mes amis. Ils me manquent tant. Depuis 3 ans, je ne suis plus présente aux rassemblements de famille et d’amis. Je ne peux plus me déplacer, même dans une voiture. 
 
Voilà. Mes envies sont simples. Mais irréalisables. 


 



Je demande aux autorités sanitaires de France une vraie bonne prise en charge de l’EM. Je n’ai pas l’allocation longue durée (ALD). Je souhaite être reconnue malade de cette pathologie. 
 
Je souhaite que tous les médecins français soient formés à cette maladie. Ce ne sont pas des exercices physiques qu’il faut prescrire aux malades de l’EM. Ces exercices physiques aggravent l’état de santé de ces patients. J’en ai fait l’expérience. C‘est la stratégie du pacing qu’il faut prescrire aux malades. 
 
Je souhaite que les chercheurs et scientifiques du monde entier travaillent en collaboration afin de trouver un remède. 
 
Je souhaite guérir, car j’ai promis à mon enfant que je jouerai de nouveau au football avec lui. 
 


Laëtitia
Rennes, France

lundi 23 mai 2022

Le témoignage de Carine: "Je limitais mes activités, je me reposais, mais rien n’y faisait."




Je suis atteinte d’EM depuis plusieurs années. Ma petite histoire avec cette maladie sournoise commence d’abord par la dissimulation.

 Cachée, elle se manifestait d’abord par "à coups" : des maux de tête, les maux de ventre, les muscles contractés au réveil. Aussi, le besoin de s’allonger en cachette dans le noir après le repas au travail pour récupérer de la matinée qui m’avait déjà pris l’essentiel de mon énergie. C’est aussi la limitation physique indépassable sous peine de violents maux de tête à l’effort malgré mes précautions : il m'a fallu renoncer à la randonnée et à la natation que j’aimais tant.

Il y a un point de bascule en 2018, à la conjonction d’un surmenage professionnel et d’un vaccin, une fatigue implacable se manifeste alors tant sur le plan physique que cognitif. Au début, je pensais récupérer rapidement, je limitais mes activités, je me reposais, mais rien n’y faisait.  La vie ne sera plus comme avant dès lors.

Cette fatigue c’est le fardeau d’un corps lourd et rouillé qu’il faut sortir du lit tous les matins avec un brouillard cérébral au réveil qui dure plusieurs heures.
 
Je ne peux plus disposer de mon corps ni de mon esprit à ma guise : il faut simplifier, éliminer, réorganiser les tâches les plus essentielles sur la journée, sur la semaine, juste pour essayer de rester autonome (faire les courses, se faire à manger, se laver, faire un minimum de ménage). J’arrête de parler de fatigue au bout de quelques mois : je vis un épuisement permanent, qui ne me laisse aucun jour de répit. Je ne sors plus de chez moi que 2 à 3 fois par semaine. 
 
Mes parents, qui ont plus de 80 ans, sont plus actifs et toniques que moi.

Pourtant, j’ai un super médecin spécialiste, mais il n’y a pas de traitements et les guérisons sont de l’ordre de 5 %.

Pourtant, je ne travaille plus et je pratique le pacing, mais je n’arrive pas à retrouver mon autonomie perdue.

Pourtant, je suis aidée, aimée, entourée, je vis à la campagne, mais cela ne me donne pas plus d’énergie de faire les choses.

Pourtant, je fais de mon mieux pour progresser et j’espère que mon corps, très lentement, pourra fabriquer de nouveau l’énergie perdue, je ne sais comment. Mais il y a toujours un plafond de verre que je n’arrive pas à dépasser.

J’ai dû quitter ma ville, ma maison, mon travail (et 2/3 de mes revenus), mes amis, et retourner vivre chez mes parents.

Je veux retrouver ma vie d’avant : mes centres d’intérêt, mes loisirs, mes plaisirs, un métier, un chez moi, des projets.
 
Aujourd’hui, je témoigne pour que cette maladie soit prise au sérieux et reconnue par les institutions, enseignée aux médecins, financée par la recherche bio médicale. Nous sommes 300 000 en France, fantômes de nous-mêmes, à espérer un avenir meilleur.

L’EM c’est bien plus que de la fatigue. Sans traitements,  on n’y arrivera pas.


Carine, France