mercredi 29 mars 2023

Une nuit à l'urgence





Vivre une nuit à l’urgence quand on vit avec l'encéphalomyélite myalgique (EM), équivaut-il à envoyer une personne de 80 ans danser dans un rave toute une nuit? Ou grimper une énorme montagne pendant des heures sans aucun entrainement physique préalable?  

Je ne sais pas. Bien malgré moi, je cherche des exemples plus ou moins farfelus pour faire comprendre autour de moi comment ce type d’évènement est très rude physiquement et mentalement pour les personnes affectées par l'EM (PAEM).

Vivre une nuit dans une urgence est une expérience assez difficile à vivre pour le citoyen ordinaire. On le sait, l’urgence d’un hôpital n’est pas un lieu de tout repos, tant s’en faut. Le niveau de stimulus de toutes sortes est très élevé. Mais pour une personne affectée par l’EM, c’est une expérience qui relève du cauchemar et qui nous affecte très durement. 

Et que dire des impacts, quelques jours plus tard? 

***
 
« Allo René? Peux-tu m’accompagner à l’urgence, je ne me sens pas bien. »
 
J’appelle mon voisin et hop, nous voilà partis vers l'urgence de de l’institut de cardiologie de Montréal.  Quelques minutes plus tard, on me passe déjà un ECG puis on me branche à un moniteur cardiaque. Une de mes filles vient me rejoindre. Un visage connue et aimé, ça fait du bien. 
 
Même si selon elle, il n’y a rien d’inquiétant, la cardiologue du triage recommande que je reste en observation pour une nuit. J’accepte. On m’installe sur ma civière…ça bouge dans tout sens à l’urgence, comme dans toutes les urgences. Pour ajouter au chaos ambiant, on m’informe que l’urgence déménage dans quelques heures dans de nouveaux locaux. Une sorte de journée historique à venir pour tout le personnel (1).

18 :00 une fois dûment branchée à un super écran qui détaille tout, une infirmière vient me voir pour des prises de sang et le test covid. 
 
Je mange une pomme que j’avais apporté au hasard. Je ne demande pas de repas, je suis déjà trop épuisée. Tout ce que je veux, c’est m’allonger et dormir, même si je me doute bien que ce sera un sacré défi. 

Nous le savons tous, de simples rideaux de coton ne peuvent bloquer ni bruits ni lumières. Même avec mes bouchons performants, impossible de m’endormir. J’écoute tout, j’entends tout.  Les conversations, les bruits des appareils, les chariots qui roulent etc. Je fixe le plafond de mon petit espace, rêvant de ma chambre et de mon lit. Je respire doucement, essayant de faire le vide... je sais bien que les prochaines heures seront difficiles à vivre. 
 
21 :30 : Un cardiologue vient me voir. Je lui décris les sensations, lui montre mes valeurs cardiaques. Il m’ausculte…Est-ce un mauvais timing de ma part ou...? Dans tous les cas, je montre au cardiologue un document sur l’EM et lui dit: se pourrait-il qu’il y ait un lien avec cette maladie? 

Il jette tout au plus un œil et dit: « Moi madame, je traite le cœur. C’est ça que je connais. Je ne connais pas cette maladie. Je vais donc me concentrer sur ce que je connais, le cœur . » Il me redonne le document et il quitte. 

À ce point de la soirée, j’en viens même à douter de la pertinence d’être venue à l’urgence. N’étais-je pas mieux de remballer mes affaires et de rentrer chez moi? La réaction du cardiologue m'a dérangée, j'avoue. Je suis convaincue que mon état d’épuisement avancé et un sacré brouillard de cerveau me faisaient douter. Le bon sens l’a emporté : que l’encéphalomyélite myalgique soit connue ou pas des cardiologues de l’urgence, et que ce soit la cause ou non de mes malaises, il faut que mon cœur soit examiné de près. 
 
11 :30 incapable de m’assoupir. Est-ce parce que j’ai faim sans le ressentir? Dans tous les cas, je mange un muffin que j’avais pu emporter, assise sur ma civière. Je m'allonge à nouveau et j’essaie de respirer lentement et de me laisser aller…
 
3 :00  un grand bruit, deux civières plus loin. Une patiente, en voulant se lever, a fait tomber sa chaise d’aisance et tout son contenu… Je vous laisse imaginer le branle-bas de combat de bruits et de manœuvres en pleine nuit pour nettoyer les dégâts. 
 
Je me lève plusieurs fois pour aller aux toilettes, aveuglée par les lumières. Tant pis, je retourne m’allonger. Peu de sommeil dans le corps. Si je me fie à ma montre intelligente, il semble que j’aurais dormi environ 1 :30 cette nuit-là.
 
7 :00 sans surprise, j’ai des maux de tête, les yeux rouges comme un lapin, mais on s’en fiche. Tout ce que je veux, c’est VOIR LE CARDIOLOGUE et qu’on me dise ce qui se passe. 
 
8 :00 c’est la distribution du petit-déjeuner. Du pain, au départ rôti, est maintenant tout mou sous la cloche de plastique. On s’en fout. J’ai faim, je suis au-delà de l’épuisement. Quel est le mot plus fort que celui-ci, ensuite? 
 
Une infirmière m’avertit que le déménagement de l’urgence commence dans moins d’une heure. Sur ma civière, je déménage comme les autres patients vers la nouvelle urgence avant d’être vue par le cardiologue et d’obtenir mon congé. 
 
9 :00  on déménage. Une infirmière attrape mes effets et on se dirige vers la nouvelle urgence. Je serai la première patiente qui a utilisé la chambre 21 de l'institut. 

So what? Si les nouvelles urgences des hôpitaux du Québec sont comme celles-ci, alors nous sommes devant une évolution vraiment positive. Le poste des infirmières est entouré de chambres non plus séparés de rideaux, mais bien des chambres avec de grandes portes vitrées coulissantes. Ces portes coupent les bruits de façon vraiment notable. Une fois dans cette chambre et avec de meilleures conditions, c’est là où j’aurais probablement pu m’endormir. D’ailleurs, j’ai pu réussir à m’assoupir quelques minutes avant de voir le cardiologue. 
 
Finalement, le cardiologue a ajusté ma médication, effectués certains tests avant la sortie et prescrits d’autres tests plus poussés à faire dans les prochaines semaines.
 
12 :30 un dernier test signe ma sortie.  J’appelle un ami qui vient me chercher. Je n’attends même pas qu’il soit arrivé : je m’installe dehors assise dans mon déambulateur. Je respire à pleins poumons l’air frais qui me manquait tant depuis hier. J'ai tellement hâte d'arriver chez moi.

 


Retour à la maison


Abasourdie et crevée, je prends une douche et saute directement dans mon lit. Le lendemain, ma fille aînée est venue me visiter pour une heure. J'étais encore sous le coup de l'adrénaline des dernières heures et j'ai pu discuter un peu avec elle. Ça m'a fait un bien fou de la voir et de la serrer dans mes bras.
 
Les deux premiers soirs, j’ai dormi "presque normalement", c’est-à-dire 8 heures d’un sommeil de mauvaise qualité, celui auquel je suis habituée depuis tant d'années!

3 jours plus tard, ça y est : c’est le malaise posteffort et ses effets dévastateurs.

C’est là où personne ne nous voit ramer, du moins pour ceux qui vivent seuls comme moi.
 
-les muscles du corps qui brûlent
-appétit disparu 
-concentration et attention difficile
-maux de tête
-jambes qui tremblent
-forte intolérance aux bruits, lumières
-forte sensation de faiblesse, comme si j’allais mourir. Je répète: comme si j'allais mourir. 
-les yeux grands ouverts, JE VEUX DORMIR. J'y arrive difficilement: je suis électrique, survoltée
-difficulté à parler
-Brouillard cognitif fort 
-Intolérance plus élevée aux odeurs et parfums


Bien sûr, ce n’est pas la première fois que je vis un malaise post-effort de cette ampleur, aussi puissant. Mais c’est toujours une fois de trop, on s’entend. 

Une difficulté nouvelle s’est ajoutée, celle de parler. J’avais encore ma voix, mais parler me demandait un tel effort, comme si je manquais d’air pour arriver à la faire sortir. Je crois plutôt que c’était dû au malaise post-effort élevé. Je ne suis pas médecin ni scientifique, mais je soupçonne que ce problème pourrait être relié au nerf vague. 

En malaise post-effort, le corps est dans un état d’inflammation encore plus aiguë, et le nerf vague est certainement mis à très rude épreuve dans ces cas-là. Il essaie bien de remettre les choses en place dans ce corps malmené, mais le défi reste de taille. 
 
Comme un ordinateur, j’ai « fermé des fenêtres ». Réduction de lumière, de bruits, de télé, de stimulations. Pour quelques jours, pas d’appel, peu de texto, de télé, question de donner une chance à mon corps de récupérer. Dans ma petite cour remplie de neige, je me suis assise sur un petit banc pour faire un peu de cohérence cardiaque, question de m’oxygéner en même temps. De l'air frais pour mon système immunitaire et ma santé mentale. J'ai aussi usé le circuit divan-lit, lit-divan à gogo, même si dormir relevait du défi. S'étaler, c'est déjà ça.
 
Avec le recul, je sais que cette nuit à l’urgence m’a coûté très cher. Trois jours avant, j’avais eu un rendez-vous médical dont je n’avais pas encore récupéré, un épuisement qui s’est ajouté à ce qui allait venir. 

Je suis prise dans une sorte de malaise post-effort multicouches dans mon corps.
 
C’est maintenant devenu systématique pour moi, comme pour beaucoup de personnes affectées par l’EM : un rendez-vous médical égale un malaise post-effort à tout coup. S’il est vrai que c’est déjà difficile à vivre et à « aplatir » avec le pacing, il reste que des extra, comme cette nuit à l’urgence, viennent encore compliquer les choses pour les malades de l’EM. 
Ces extra coûtent chers et comportent aussi des risques : celui de rester « coincé » dans une phase aiguë, en bref, de rempirer la situation de santé déjà hypothéquée. 

La santé peut-elle s’hypothéquer davantage avec ces malaises post-effort à répétition? La réponse est oui.  (2) 

Je ne suis pas en état sévère, mais le risque est pourtant bien réel de s'y retrouver si je ne fais pas attention à ma précieuse énergie. L'idée n'est pas de vivre dans la peur (quoi que...), mais plutôt d'en être conscient et d'appliquer le pacing (3) le plus possible. Je ne vois pas d'autres manières de conserver le peu d'énergie physique. 

À elle seule, l’encéphalomyélite myalgique demande beaucoup d’énergie au quotidien, ne serait-ce que de composer avec les symptômes imprévisibles et une énergie sur laquelle on peut difficilement compter, car incertaine et instable. D’autres problématiques de santé s’ajoutent, alourdissant encore davantage la situation de santé. Je pense ici aux personnes affectées qui sont passées à travers un ou des cancers et bien d’autres maladies. 

Je relève lentement et péniblement de cette nuit. Je recommence à peine à reprendre le cours normal de ma vie. C'est fragile pour tout vous dire. 

Au moment de terminer ce billet, on vient de m'appeler pour me donner un rendez-vous à l'institut dans les prochains jours, un des tests à effectuer.  

J’espère au moins ne pas revivre une telle nuit de si tôt. Les coûts physiques et émotifs sont éminemment élevés. Je n’ai pas le moyen de vivre de tels coûts sans conséquences importantes sur ma vie. 

Je mise sur l'arrivée du printemps et de la douceur du temps pour me remettre encore mieux sur pied, si cela se peut.

🌻





mardi 28 février 2023

En attendant le printemps, de tout et de rien.



En attendant le printemps, voici quelques pensées sur mon air du temps. Ce n’est pas qu’il y a tant à dire, tout juste une somme de petites choses du quotidien.
 
Au moment d’écrire ces lignes, une délicieuse odeur de muffins à l’orange et aux dattes flotte dans ma maison. Je rêvais d’en cuisiner depuis le mois de janvier, ce qui ne me ressemble pas. Parce que j’ai pour habitude d’en cuisiner de 2 à 3 fois par mois. Pourtant jusqu’à ce jour, les muffins étaient pour moi une de mes recettes idéales, car elle comporte peu d’étapes et se mélange de façon grossière. L’énergie manque, et l’envie aussi. Comme si mon "ressort" habituel, ce qui me fait bondir par en avant,  ne rebondit justement pas. 
 
Autre sujet. Pour l’été qui vient, j’ai décidé de ne pas démarrer de semis, une première depuis des années. Là aussi, le ressort-semis ne rebondit pas. Pourtant, j’adore lancer cette aventure chaque année.  J’achèterai les fines herbes déjà bien fournies, et ce sera OK comme ça.  

Dans tous les cas, j’observe ce phénomène de non-rebondissement. Et j’ai décidé de le suivre sans trop me poser de questions.  Je ne force pas, je laisse aller, je laisse vivre. Je pense devoir respecter et honorer cet état, et je me sens bien avec ça.
 



 
Tournée médicale

J'ai débuté la tournée de mes spécialistes. La semaine dernière, j’ai vu le cardiologue, et la semaine prochaine, le neurologue est prévu à l’horaire. 
 
Je me suis fait un petit cahier de notes divisé en section par spécialistes. Rassembler ainsi mes notes m’aide passablement. Par exemple, si je ressens des symptômes particuliers, je vais les noter dans la section à cet effet. Si entre temps, j’ai obtenu des rendez-vous qui impliquent d’autres spécialistes, alors je peux facilement y référer et lire les notes prises lors des rendez-vous. Ça m’aide à mieux gérer mes rendez-vous médicaux et à conserver les notes de ce qui a été dit. Mes rendez-vous sont souvent en après-midi, période très difficile sur le plan énergétique et cognitif. Le brouillard de cerveau me tombe dessus, difficile de rester "présente". 

Je ne me casse pas trop la tête avec la prise de notes : je mets des mots-clés, et me connaissant, je sais que ça m’aidera à me rappeler de quoi il était question, ou presque. En somme, j’essaie un peu d’être mon propre médecin de famille en centralisant les informations. 
 
Mais ce que je trouve difficile à vivre, c’est de ne pas avoir de spécialiste pour l’encéphalomyélite myalgique. Certes, j’aurai un nouveau médecin de famille cet été, et c’est beaucoup déjà, je l’admets. Je n’ai aucune idée de ce que seront ses connaissances sur l’EM. Quoiqu’il en soit, pour le moment, comme bien d’autres personnes affectées par l’encéphalomyélite myalgique, je ne saurais vers qui me tourner si je devais consulter sur ma situation de santé. 




En attendant le printemps, je visionne ma magnifique collection de photos de fleurs de l’été dernier. Dans mon petit cocon de chaleur, je m’occupe de mes plantes d’intérieur, et je pense à la nature endormie sous la neige qui ne manquera pas de s’éveiller dans peu de temps encore. 
 
Si je pouvais être un bourgeon, soyez-en certain, je m’éclaterai avec joie à ce merveilleux soleil tout chaud de printemps à venir :)

 
Finalement, mes muffins sont prêts. Je vous en offre un? 
 
 
 

 

J'ai remplacé le beurre par de l'huile, j'ai ajouté des graines de chia et des amandes moulues. Très bon, pas trop sucré. 
 

mercredi 8 février 2023

"Ma maison" par Hélène F.

 


J’aimerais vous parler de mon havre. 

C’est un bel endroit à mon image, avec mes photos, mes pots de fleurs, mon jardin que j’aperçois depuis mon lit. J’ai tant de chance ! 

On m’ouvre les fenêtres et la porte du jardin, je laisse l’air du dehors me caresser le visage et remplir ma maison. Je sens l’humidité, la pluie, la chaleur, le bruit de la ville, mais aussi l’herbe coupée, le vent, et les pétales de fleurs des cerisiers venir jusqu’à moi grâce à une brise légère. 

Il y règne une douceur rassurante.

Rassurantes comme mes auxiliaires de vie, mon matériel, mes adaptations. Rassurant comme la répétition de mes aides et des gestes du quotidien qui ponctuent mes journées sans surprise dans ce havre. 

Ce havre, c’est ma protection qui me sauve littéralement des sollicitations de la vie normale, des conversations, des bruits, des sons, des mouvements, de la lumière qui me feraient me dégrader encore plus. C’est un rempart contre l’agitation du monde et de la vie ordinaire, même si les bonheurs et les soucis parviennent évidemment à pénétrer ma bulle. 

Dans ma bulle, je choisis par toutes petites touches, mes agitations : radio, ouverture sur le monde et ses débats, interactions sociales. Pour vivre juste l’essentiel avec mes tout proches. Pour éviter l’enfermement qui coupe et sépare. Sans m’aggraver, juste pour espérer. 

Parfois découragée et triste, je me dis que mon havre est surtout une prison qui m’isole, avec mes murs, mes fenêtres d’où j’entre aperçois les voisins, les bruits. Bref, la vie ordinaire qui passe sans moi, au fur et à mesure que les années passent. 

Si ma santé se stabilise puis s’améliore enfin, au moins un peu, comment pourrais-je un jour, sans peur de me redégrader, ressortir doucement et retrouver la ville et un semblant de vie ordinaire ? De toute façon, cette interrogation n’est pas d’actualité. 

Alors je regarde mes fleurs, m’émerveille de leur beauté et je reprends espoir. 
L’espoir qu’avec le temps et le repos, mon état s’améliore. 

L’espoir qu’un traitement à l’EM arrive. Pour petit à petit, retrouver un périmètre de vie élargi, puis grand comme le vaste monde qu’il me reste à découvrir. 

Je suis encore si jeune, j’ai tant de rêves !


Hélène F.
Massy, France 
 
 



dimanche 29 janvier 2023

Le mode conditionnel et la réalité


Si on ne peut avoir la réalité, un rêve vaut tout autant. -Ray Bradbury



J’aimerais faire tant de choses!

Je rêve...

J’aimerais partir en randonnée dans le bois et faire de la raquette dans la belle neige poudreuse. La réalité, c'est qu'après seulement quelques minutes de marche, je dois m’asseoir sur mon déambulateur, les jambes tremblantes. Je n'ai pas de "jus" (énergie), comme on dit au Québec.


J’aimerais sauter dans une piscine et nager tout mon saoul comme je le faisais «avant» l'arrivée de l'encéphalomyélite myalgique. La dernière expérience de quelques minutes a résulté en un malaise post-effort, même sans avoir vraiment nagé. Je rêve de re-tenter l'expérience...un de ces jours.


J’aimerais aller danser et rentrer tard. S'il m’arrive de faire quelques pas de danse chez moi (rares, il faut le dire), je ne peux plus boire d’alcool (crash garanti), ni me coucher « tard ». Tard pour moi étant maintenant de s’endormir à 20 :00. 





J’aimerais accompagner un ami dans sa maison de campagne sur le top d’une montagne. Pour y arriver, il faut dix heures de route. Après une sortie d’une heure dans mon quartier, je suis épuisée et je rentre. Comment faire toute cette route sans tomber dans un malaise post-effort "dont les coûts physiques et émotifs sont élevés? 


J’aimerais louer une voiture et partir à l’aventure dans la magnifique région de Charlevoix. J’en rêve depuis des années déjà. Je n’ai pas conduit depuis maintenant cinq années, et le voyage est long, encore une fois.  Je m’épuise trop rapidement.


J’aimerais remplir ma valise et voyager en Europe, Amérique du Sud, etc. 
C’est à peu près l’équivalent de vouloir aller sur la lune en terme énergétique. Pourtant actuellement, il m’est difficile de visiter mes filles dans ma propre ville.


J’aimerais être en train de train de travailler dans mon ancien bureau et retrouver mes collègues. Impossible, juste impossible. Je me tiens près de chez moi, près du lit et du divan. C'est mon circuit de sécurité physique en tout temps avec un épuisement élevé et les changements rapides qui surviennent. 


Parfois, juste vivre le quotidien demande beaucoup d'énergie. Souvent, il ne reste pas grand chose pour....autre chose! 

 
Je me suis faite une liste de petits projets à réaliser. Et j'ai vraiment envie de les faire. Pourtant, rien ne rebondit pour me mettre à l'action. Ce n'est pas que cet état me plaît, mais ne rien forcer reste la meilleure solution, pour le moment. 


Un rêve, en particulier, ne me lâche pas depuis des années. C'est celui de pouvoir mettre mes pieds dans un océan, n'importe lequel. 

Faute d'énergie et de faisabilité, j'écoute alors le son des vagues et me laisse emporter vers un ailleurs. Quand je prends ma douche assise le matin, je pense souvent à ce rêve d'océan. Je me console en me disant que j'ai la chance d'avoir accès à de l'eau courante, ce qui n'est pas le cas pour tous sur la planète...

La réalité est aussi simple que cela. J'ai le temps, l'argent mais je n'ai plus la santé pour ces rêves...

Il me reste internet. J'adore suivre les pages de ceux qui vivent en pleine nature, comme la page de Jonna Jinton qui sans forêt suédoise, rejoint 4 millions de personnes:  https://www.youtube.com/watch?v=HsKWoCJ3eq4







mardi 10 janvier 2023

C'est à mon tour

 



La fin de l’année 2022 n’avait pas encore dit son dernier mot chez moi. 
 
Après avoir distribué généreusement de grands câlins à mes visiteurs, -sans masque et sans méfiance aucune, la covid m’est tombée dessus. 
 
Le lendemain, un mal de gorge foudroyant. Et rapidement les maux de tête, nausées, sensation de faiblesse décuplée, perte de l’odorat et du goût ont pris le relais. Je n'ose imaginer ce que cela aurait été sans les cinq vaccins reçus à date. 
 
Famille et amis ont été avertis, et tous n’attendaient qu’un signal de ma part pour débouler avec de la nourriture, des médocs etc. 

Deux paires de voisins sont venus me livrer des repas maison, quelle merveille. Le seul hic: je ne goûtais rien. 
 
Je me suis un peu forcé à manger, pour me soutenir, mais l'appétit avait disparu. 
 
Je remonte de tout cela avec lenteur. Dans tous les cas, je me suis dit que je n’avais pas besoin d’avoir peur de me retrouver en état covid longue, j’ai déjà l’EM. Une certaine ironie que vous comprendrez probablement. 
 
Déjà, ma liberté d’action est limitée en vivant avec l’encéphalomyélite myalqique. Ce retrait chez moi m’a fait vivre de la colère, de la tristesse. Je ne suis pas fière de mon imprudence, avec mes câlins des Fêtes. 
 
Ce temps covid m’a fait réaliser que même en adoptant une discipline de vie, bien d’autres défis de santé peuvent se pointer et ajouter du poids à la situation. 
 
J’ai réalisé, encore une fois, combien ma marge de manœuvre physique est bien mince avec l’encéphalomyélite myalgique en toile de fond, devant des imprévus comme la covid. 

J’ai vraiment bien peu de résistance physique et émotive pour y faire face. 

Ma liberté de mouvement habituelle s’est retrouvée limitée du jour au lendemain. Emmitouflée, j’ai réussi à prendre l’air dans ma petite cour arrière, non sans penser à ceux qui ne peuvent pas même sortir. 

Ici, je pense aussi aux personnes affectées par l’encéphalomyélite myalgique qui sont en état sévère ou ceux doivent faire face à d’autres défis de santé. Bien d’autres problèmes de santé et comorbidités peuvent complexifier un tableau déjà lourd.
 
J’ai fini par vraiment sortir de chez moi, aspirant goulûment l’air frais comme si je sortais de prison. Et pour moi, oui, c’en était une. 

Sortir à tout prix, même si j’ai encore un peu les jambes qui flanchent, des jours plus tard. 
 
J’ai presque retrouvé le niveau de liberté habituelle d’avant la covid. 
 
Ma conclusion est que même si mon niveau de liberté est bien mince en vivant avec l’encéphalomyélite myalgique, il reste que j’y tiens mordicus. 

Je vais tout faire pour la préserver farouchement.


Exit les câlins :)
 
 

mercredi 21 décembre 2022

Légèreté et espoir

 


Je crois toujours que c'est la légèreté qui nous sauve -Philippe Besson


Il me semble que l’année 2022 a été intense sous plusieurs aspects. 


Ne serait-ce que sur le plan de l’actualité mondiale, nous en avons eu largement l'expérience : guerres, catastrophes naturelles et humaines, etc., ont occupé le devant de la scène, sans compter ce que nous vivons dans notre pays, ville puis notre quartier. Ici, au Québec, nos hôpitaux débordent d’enfants, d’aînés malades et de personnel fortement épuisé. Brassez le tout dans un climat d’inflation élevé tant ici qu'ailleurs dans le monde. 

 

Je ne sais pas pour vous, mais moi,  je ressens une grande envie de légèreté. Je ne sais pas encore comment cela se traduira, mais c’est ce dont j’ai besoin.


J’aimerais bien être une fée clochette et hop! je mettrais une touche de légèreté ici, une autre par là. 

 

Si je pouvais, je donnerais du silence où il y a trop de bruits, que ce soit des bruits physiques ou ceux plus discrets, de la tête ou du cœur. Question d’avoir une pause. 

 

Si je pouvais, je mettrais des sons très doux pour ceux et celles qui n’en peuvent plus de ce silence trop lourd à porter. Ça pourrait mettre un peu de vie. 

 

Si je pouvais, je déposerais des touches de douceur là où il y a trop de rudesse. Ça aiderait à reprendre son souffle et nourrir le coeur.

 

Si je pouvais, j’injecterais une bonne dose d’espoir dans le cœur de ceux qui en manque. Ça aide à tenir le coup pour avancer demain, même si c'est difficile. 






Si je pouvais, j’aimerais que les personnes affectées par l’encéphalomyélite myalgique de par le monde soient entourées de joie, de calme, de douceur et de bons soins pour les soulager, les supporter. Ça donnerait foi en la vie et en ses lendemains. 

 

Comme je n’ai que mes mots, alors j’en profite pour souhaiter aux PAEM de ce monde une période des Fêtes avec de douces surprises et surtout, beaucoup de légèreté. 


Parce que nous n’avons jamais de congé de la maladie, Fêtes ou pas.


Que ces moments soient sous le signe de la lumière, de la joie et de l’espoir. Que la santé de chacun soit une priorité avec des soins et un encadrement professionnel approprié et personnalisé.

 

Après l’espoir, il y a encore de l’espoir. 

 

Pour 2023, je nous souhaite des résultats de recherche sur l’encéphalomyélite myalgique qui seront aussi éclatants et convaincants que notre patience l’est depuis toutes ces années.


Au plaisir de vous retrouver bientôt 


🌻


P.S. Psitttt....ce n'est pas une révolution, mais j'adore allumer des bougies, même le matin :) 

 


 

mercredi 14 décembre 2022

Quelques changements en 2022



Je me suis amusée à faire un petit bilan non exhaustif de quelques changements survenus ou que j'ai fait en 2022. Je mets la loupe sur des choses ou des personnes qui ont contribué à mon bien-être et amélioré mon quotidien. Certains changements sont de mon fait, d'autres non. 

Si parfois l'idée d'apporter des changements apportent son lot d'anxiété, ça vaut parfois la peine de s'y mettre pour améliorer ne serait-ce qu'un peu sa vie. Et qui sait, d'avoir de belles surprises?

Je trainais la décision depuis deux ans, mais j’étais dû pour changer de dentiste! Situé près de mon ancien lieu de travail (mais vraiment trop loin), m’y rendre me demandait une énergie folle, et c'est sans compter que le dentiste « oubliait » souvent mon hypersensibilité. J’ai finalement changé pour un dentiste dans mon quartier, à quelques rues de chez moi. Le bonheur, rien de moins. Nouveaux professionnels sensibilisés, nouveaux lieux, on aime. Pourtant, même si je souhaitais ce changement, j’étais nerveuse à l’idée de changer. Ce fut un changement positif et payant pour moi. Tellement contente de m'être lancée, finalement...






L'ostéopathe est une nouvelle professionnelle dans mon paysage bien-être depuis avril dernier. Ce n’est pas la première fois que je consulte en ostéopathie, mais celle-ci est une professionnelle particulière. Ça clique vraiment bien entre nous:  elle est très ouverte, attentive et réceptive. Elle ne connaissait pas l’encéphalomyélite myalgique, mais qu’à cela ne tienne, elle a appris assez rapidement. Après lui avoir apporté différents documents tels le consensus, des articles sur l’EM, documents sur le malaise post-effort, etc., mon ostéopathe sait bien maintenant ce qu’est l’EM. À un point que je ne soupçonnais pas lorsqu’elle m’a rappelé, dernièrement, certains déclencheurs de malaise post-effort que j’avais oublié. Impressionnant. Elle est aussi une excellente vulgarisatrice pour expliquer les fonctions du corps, et en toute douceur, elle prend le temps de vraiment répondre à mes questions. Elle m’encourage dans mes ressentis, ce que je trouve positif et encourageant, surtout quand on vit avec des maladies chroniques. Un beau plus dans mon quotidien avec la maladie. L'autre bonus? Mon ostéo est à quelques rues seulement de chez moi :) 
 

Ma thérapie en psychologie se poursuit. J'avoue être très fière du chemin parcouru. Je fais d’étonnantes découvertes sur moi, ma vie, qui me bouleversent et me ravissent à la fois. Il m’arrive souvent de me dire que ces séances sont de véritables cadeaux. Mieux comprendre qui l’on est à travers ses choix et sa vie est une démarche stimulante et positive. Douloureuse aussi parfois. C’est comme si je me donne à moi-même des clés -avec du soutien-, pour ouvrir certaines portes barricadées. J’avais débuté ces séances en présence, mais depuis mars, nous sommes passées au mode virtuel. Ce passage au virtuel m’a aidé à économiser ma précieuse énergie. Je termine une session Zoom avec ma psy et je retourne à ma vie, sans déplacement. Que demander de mieux? C’est un bonheur d’être chez soi et d’avoir accès à une professionnelle pour me soutenir dans mon cheminement personnel. Un bon changement en ma faveur.




Avec mes voisins de cour, nous sommes devenus plus proches au cours de l’année. Entre autres, René offre gentiment et régulièrement des aller-retour à mes rendez-vous médicaux et pour les courses.  C’est généreux, sympathique, toujours dans la bonne humeur et le sourire. Nerveuse avant ces rendez-vous (y en a trop!!), René a le don, par sa seule présence, de m’apaiser avant que je ne saute dans l’hôpital ou la clinique. C’est tout un bonus que je ne tiens pas pour acquis, loin de là. Tous deux retraités, mes voisins sont d’incroyables épicuriens qui ont beaucoup voyagé. Les sujets de discussion ne manquent pas, et je me trouve incroyablement chanceuse de les compter parmi mes amis. Leur présence est rassurante et plaisante. Je sais que je peux compter sur eux tant pour jaser que pour des de l'aide et même en cas d'urgence. 

 
Cette année aussi, l’achat de mon déambulateur aura été une de ces bonnes idées dont je suis particulièrement fière. D’abord un peu craintive, j’avais l’impression d’exposer une certaine vulnérabilité en l'utilisant. Toujours est-il que maintenant, je ne m’en passerais plus : il est devenu essentiel. Quant à ma perception de vulnérabilité, eh bien ça me préoccupe vraiment plus : moi je roule et j’ai du plaisir à prendre l'air dans mon quartier. De toute manière, je ne vais pas très loin.  Très vite, j’ai senti comment mon outil stabilisait ma marche et m’aide aussi à épargner mon énergie. D’autant plus utile dans le contexte de pénurie de personnel dans les commerces actuellement au Québec: dans une file de personnes à la caisse, moi je m’assois dans mon déambulateur et j’attends patiemment mon tour. Mon corps ne s'en porte que mieux! C’est vraiment un grand plus qui m’aide beaucoup au quotidien.


 
 

Une amie a créé un tableau similaire, avec ma photo et mes "heures d'ouverture", c'est à dire les heures de disponibilité pour parler ou une recevoir une visite planifiée. Pour les besoins de la cause, j'en ai créé un ici avec la photo de Barack pour vous donner une idée. Comme si Barack Obama était d'EM....C’est tout simple, mais c’est fort utile. Je m’en sers pour mes amis, ma famille, je l’affiche chez moi, et je l'envoie à ceux qui veulent connaître mon horaire. Ça aide tout le monde à se situer dans cet horaire, et les commentaires positifs confirment son utilité.

Au fil du temps en vivant avec cette maladie, j'ai compris qu'un horaire régulier m'aide à mieux gérer mon énergie.  

Bien sûr, si mon état change, on s’adapte et on reporte. Mine de rien, c'est une très bonne contribution à mon quotidien. Merci encore, Carmen, pour cette idée qui aide à ma gestion énergétique. 

 
Des changements moins "plaisants"… 
 
Ben oui, il y en a toujours! En janvier 2023, je perds mon médecin de famille, comme bien des Québécois. Je suis sur une liste d’attente pour en avoir un autre, mais d’ici là, je devrai compter sur le sans rendez-vous pour être vue, du moins en médecine générale. Au moins, je conserve mon neurologue que je vois depuis 2007. C'est déjà ça.
 
Cet été, je me suis décidée d’être traitée en fasciathérapie. Il y a des années, je me ces séances me faisaient un bien incroyable, je fondais littéralement de détente sur la table de massage. Or ce retour vers la fascia ne s’est pas déroulé comme je l’espérais : au lieu de détendre mon corps, ce fut plutôt en malaise post-effort que je me suis retrouvée. Ce qui me faisait du bien il y a des années a plutôt maintenant pour effet de créer de l’inflammation dans mon corps. Pour en être certaine, j’ai essayé deux séances distancées dans le temps, mais rien à faire : le malaise post-effort apparaît, même avec si la thérapeute y est allée avec le minimum de « force ».  Bref, un essai non concluant...

L'année 2022 fut riche en changements qui ont eu de bons effets et d'autres un peu moins. Mais somme toute, je suis contente de constater comment ces changements ont apporté des bienfaits, même si parfois je pouvais ressentir de la nervosité pour les mettre en oeuvre. Certains changements ont été payants d'autres moins, mais somme toute je suis contente de ce que l'année 2022 a pu apporter.  

Je me sens reconnaissante d'être aussi bien entourée tant sur le plan professionnel de santé que personnel, une chance que je savoure. 

On dit que ça prend tout un village pour faire grandir un enfant, moi, j'aurais tendance à dire que ça prend toute une équipe pour soutenir les personnes affectées par l'encéphalomyélite myalgique. Médicalement et socialement....


Et vous, avez-vous vécu de ces changements qui ont été bénéfiques pour votre bien-être?

🌻